"Mort à crédit" - Louis-Ferdinand Céline
Pourvu qu'on ait l'ivresse.
Pourquoi lire Céline ?
Sans doute la réponse semblera-t-elle évidente à ceux qui l’ont déjà lu, mais comment convaincre les autres ? Et comment définit-on -car c'est bien là qu'est la question- une œuvre comme étant majeure et indispensable ?
C’est comme pour la musique classique. J’avoue aisément ne pas y connaître grand-chose, mais lorsque je prends la voiture (l'un des rares moments où j’ai l’occasion d’écouter un peu de musique, puisque je ne peux pas lire en conduisant !), j’ai l’habitude de choisir des stations de radio qui en diffusent. Je ne me soucie guère d’élargir ma culture dans ce domaine, et peu m’importe le nom du compositeur ou le titre de l’œuvre qui passe ; ce qui compte, à ce moment précis, c’est le plaisir que me procure cette écoute. Il y a une évidence qui surgit, celle de l’art, du talent, et cette délicate alchimie qui mêle la maîtrise de cet art à une espèce de facilité dans l’excellence, comme si elle était naturelle, innée.
C'est probablement ce que l'on appelle le "don", ce pouvoir de transformer l'exigence et les difficultés inhérentes au savoir-faire en une œuvre complexe et pourtant accessible par l'évidence de sa beauté.
Et c'est ce que j’ai ressenti à la lecture de "Mort à crédit" (tout comme à celle du "Voyage..."). L’auteur donne l’impression de s’adonner à un long bavardage spontané, aux consonances populaires (et il est particulièrement loquace !), mais on devine aussi clairement sous ce "badinage" à l’apparence facile le virtuose du langage qu’est Céline. Chaque mot est à sa place, et associé aux autres de façon à donner à l'ensemble du texte ce rythme si particulier, qui nécessite presque un effort d'adaptation respiratoire de la part du lecteur ! Les phrases se suivent avec une sorte de précipitation, souvent séparées par trois points de suspension, et certains passages sont de véritables orgies de métaphores et d'expressions qui peuvent paraître de prime abord improbables, mais qui sont en réalité fort éloquentes.
Sans doute la réponse semblera-t-elle évidente à ceux qui l’ont déjà lu, mais comment convaincre les autres ? Et comment définit-on -car c'est bien là qu'est la question- une œuvre comme étant majeure et indispensable ?
C’est comme pour la musique classique. J’avoue aisément ne pas y connaître grand-chose, mais lorsque je prends la voiture (l'un des rares moments où j’ai l’occasion d’écouter un peu de musique, puisque je ne peux pas lire en conduisant !), j’ai l’habitude de choisir des stations de radio qui en diffusent. Je ne me soucie guère d’élargir ma culture dans ce domaine, et peu m’importe le nom du compositeur ou le titre de l’œuvre qui passe ; ce qui compte, à ce moment précis, c’est le plaisir que me procure cette écoute. Il y a une évidence qui surgit, celle de l’art, du talent, et cette délicate alchimie qui mêle la maîtrise de cet art à une espèce de facilité dans l’excellence, comme si elle était naturelle, innée.
C'est probablement ce que l'on appelle le "don", ce pouvoir de transformer l'exigence et les difficultés inhérentes au savoir-faire en une œuvre complexe et pourtant accessible par l'évidence de sa beauté.
Et c'est ce que j’ai ressenti à la lecture de "Mort à crédit" (tout comme à celle du "Voyage..."). L’auteur donne l’impression de s’adonner à un long bavardage spontané, aux consonances populaires (et il est particulièrement loquace !), mais on devine aussi clairement sous ce "badinage" à l’apparence facile le virtuose du langage qu’est Céline. Chaque mot est à sa place, et associé aux autres de façon à donner à l'ensemble du texte ce rythme si particulier, qui nécessite presque un effort d'adaptation respiratoire de la part du lecteur ! Les phrases se suivent avec une sorte de précipitation, souvent séparées par trois points de suspension, et certains passages sont de véritables orgies de métaphores et d'expressions qui peuvent paraître de prime abord improbables, mais qui sont en réalité fort éloquentes.
En résumé, Céline déploie une verve infatigable !
Un exemple ? :
"Je me laissais pas embringuer... J'étais plus bon pour la parlote... J'avais qu'à me rappeler mes souvenirs... Le gueuloir de la maison !... les limonades à ma mère !... Toutes les vannes qu'on peut vous filer avec des paroles ! Merde ! Plus pour moi ! J'avais mon sac !... J'en étais gavé pour toujours des confidences et des salades !... Salut ! J'en gardais des pleines brouettes... Elles me remontaient sur l'estomac, rien qu'à essayer... Ils m'auraient plus..."
ou :
"...On le bafoue ! On me pourchasse ! On me glaviote ! En plein Paris ! Bien ! Bon ! Soit ! Qu'ils aillent tous se faire pustuler !... Que la lèpre les dissèque ! Qu'ils fricassent en cent mille cuves remplies de morve et de cancrelats ! J'irai les touiller moi-même ! Qu'ils macèrent ! Qu'ils tourbillonnent sous les gangrènes ! C'est pain bénit pour ces purulents !"
Vous voyez ? Et c'est qu'il est drôle, en plus ! Ce qui prouve qu'il n'est nul besoin d'être austère, rigide et de se prendre au sérieux pour réaliser des œuvres géniales... je dirais même : au contraire... Ce qui peut sembler surprenant, c'est que la truculence du ton n'empêche pas le fond du récit d'être particulièrement sombre. En suivant les pérégrinations du jeune Ferdinand, narrateur de "Mort à crédit", c'est avec toute la crasse de l'humanité que nous nous colletons. Et ce dans les deux sens du terme : l'humanité de Céline chie, vomit, pue, mais surtout elle est mauvaise, vile, égoïste (heureusement, il a aussi pris soin d'introduire dans son récit des personnages -même s'ils sont rares- qui redorent quelque peu l'image du genre humain...)
Il y a donc des tas de raisons pour lesquelles il faut lire Céline... parce que c'est drôle, intelligent, original, et, le plus important... parce ce qu'il y a de grandes chances pour que vous y preniez du PLAISIR !
Chouette article !
RépondreSupprimerEt tu as bien choisi les extraits ! :-)
Ça devrait donner envie aux récalcitrants.
J'espère bien, que ça leur donnera envie !
RépondreSupprimerCa me donne envie... :)
RépondreSupprimerJe ressens la même chose avec la musique classique. Cette sorte d'évidence qui nous dépasse. Le parallèle avec Céline est astucieux. Et puis Mort à Crédit quoi ! La traversée vers l'Angleterre est le moment qui me revient à chaque fois que je pense à ce livre.
RépondreSupprimerC'est vrai que c'est l'un des grands moments du roman... parmi tant d'autres !
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