"Là-bas" - Joris-Karl Huysmans
Au fond de mes cartons, j'ai trouvé...
L'attirance de Durtal pour ce glorieux et regretté Moyen-Age le conduit à concrétiser un projet de roman sur Gilles de Rais.
Avec une telle œuvre, il est sûr de se détacher de la littérature contemporaine. Difficile en effet avec un sujet pareil de faire dans l'édulcoration ou le médiocre. Son souci n'est d'ailleurs pas de plaire aux foules, mais d'effectuer une recherche personnelle profonde et sérieuse. Une recherche qui va l'amener à s'intéresser au satanisme et à la démonologie, courants avec lesquels Gilles de Rais fit plus que flirter, puisque cet ex compagnon d'armes de Jeanne d'Arc en arriva à assassiner, violer et torturer des dizaines d'enfants lors de cérémonies occultes...
Il est aisé de voir en Durtal le double de Joris-Karl Huysmans, lorsque l'on sait que l'auteur rompit avec le mouvement naturaliste dont il fit lui-même partie durant quinze ans. Son personnage principal est probablement le porte parole de ses propres doutes et réflexions non seulement sur l'évolution de sa création littéraire, mais aussi sur l'ensemble de ses questionnements spirituels et moraux. Lui qui se convertit à la fin de sa vie au catholicisme semble dans un premier temps, avec "Là-bas", prendre la mesure de l'ampleur de la présence du Mal autour de nous.
Ce livre prenait la poussière dans ma bibliothèque depuis une bonne vingtaine d'années. Je crois l'avoir acheté à une époque où, éprise de poésie Baudelairienne, de littérature sombre et fantastique, j'avais été convaincue par une quatrième de couverture évoquant "un pittoresque et brillant roman de l'étrange". Et puis, je ne sais pas... effrayée peut-être par ses premières lignes, qui annoncent un récit ambitieux, complexe, je l'ai remis de coté. En réalité, j'en suis ravie, puisque cela m'a permis de découvrir aujourd'hui un ouvrage certes ambitieux, mais complètement abordable, avec lequel j'ai passé un excellent moment !
"Là-bas" débute par une discussion à propos du naturalisme entre Durtal, principal personnage du roman, et son ami Des Hermies. Ce dernier remet en cause ce courant littéraire auquel il reproche de ne s'intéresser qu'à l'aspect trivial de la vie, de n'étudier que des êtres médiocres, de ne pas tenir compte de l'âme et de la spiritualité.
Durtal, quant à lui, s'interroge... il admet ne pas apprécier le matérialisme et son réalisme rigide, mais quelle est l'alternative à ce mouvement ? Il n'est pas non plus question de revenir aux balivernes larmoyantes du romantisme ! Ce ne sont pas en tous cas les "littérateurs" de cette fin de XIXème siècle (qui selon lui, se divisent en deux catégories : les cupides bourgeois affamés d'argent et de considération, et les abominables mufles issus de la racaille), qui vont ouvrir la voie à un art plus noble, plus élevé...
Durtal, quant à lui, s'interroge... il admet ne pas apprécier le matérialisme et son réalisme rigide, mais quelle est l'alternative à ce mouvement ? Il n'est pas non plus question de revenir aux balivernes larmoyantes du romantisme ! Ce ne sont pas en tous cas les "littérateurs" de cette fin de XIXème siècle (qui selon lui, se divisent en deux catégories : les cupides bourgeois affamés d'argent et de considération, et les abominables mufles issus de la racaille), qui vont ouvrir la voie à un art plus noble, plus élevé...
Et la littérature n'est pas la seule à baigner dans cette déplorable médiocrité ! Il juge en effet son époque de façon très sévère, estimant que "la société n'a fait que déchoir depuis les quatre siècles qui (la) sépare du Moyen-Age", et ce, aussi bien d'un point vue moral que social. L'une des principales causes de cette déchéance serait justement le triomphe du matérialisme, le capitalisme et la soif d'argent ayant terrassé la grandeur d'âme et l'héroïsme. L’Église elle-même "hait les pauvres, prêche la bourgeoisie de l'âme". Et quant aux bourgeois, justement, ils ont remplacé une noblesse "sombrée dans le gâtisme ou dans l'ordure". Le peuple n'échappe pas lui non plus à cette diatribe vénéneuse : il serait devenu mauvais travailleur et alcoolique, car "n'a plus l'indispensable crainte du vieil enfer" !
L'attirance de Durtal pour ce glorieux et regretté Moyen-Age le conduit à concrétiser un projet de roman sur Gilles de Rais.
Avec une telle œuvre, il est sûr de se détacher de la littérature contemporaine. Difficile en effet avec un sujet pareil de faire dans l'édulcoration ou le médiocre. Son souci n'est d'ailleurs pas de plaire aux foules, mais d'effectuer une recherche personnelle profonde et sérieuse. Une recherche qui va l'amener à s'intéresser au satanisme et à la démonologie, courants avec lesquels Gilles de Rais fit plus que flirter, puisque cet ex compagnon d'armes de Jeanne d'Arc en arriva à assassiner, violer et torturer des dizaines d'enfants lors de cérémonies occultes...
Pour tenter de comprendre comment cet homme raffiné, spirituel et érudit, en vint à commettre de tels actes, il va lui-même fréquenter les cercles sataniques.
Il est aisé de voir en Durtal le double de Joris-Karl Huysmans, lorsque l'on sait que l'auteur rompit avec le mouvement naturaliste dont il fit lui-même partie durant quinze ans. Son personnage principal est probablement le porte parole de ses propres doutes et réflexions non seulement sur l'évolution de sa création littéraire, mais aussi sur l'ensemble de ses questionnements spirituels et moraux. Lui qui se convertit à la fin de sa vie au catholicisme semble dans un premier temps, avec "Là-bas", prendre la mesure de l'ampleur de la présence du Mal autour de nous.
Les progrès sociaux (l'instauration de la démocratie) et scientifiques (Des Hermies, l'ami de Durtal, qui est médecin, est incapable de soigner les victimes de sortilèges sataniques) n'ayant visiblement apporté aucune solution pour lutter contre ce Mal, sans doute en conclut-il qu'il n'y a plus qu'à se tourner vers la religion...
Ce livre prenait la poussière dans ma bibliothèque depuis une bonne vingtaine d'années. Je crois l'avoir acheté à une époque où, éprise de poésie Baudelairienne, de littérature sombre et fantastique, j'avais été convaincue par une quatrième de couverture évoquant "un pittoresque et brillant roman de l'étrange". Et puis, je ne sais pas... effrayée peut-être par ses premières lignes, qui annoncent un récit ambitieux, complexe, je l'ai remis de coté. En réalité, j'en suis ravie, puisque cela m'a permis de découvrir aujourd'hui un ouvrage certes ambitieux, mais complètement abordable, avec lequel j'ai passé un excellent moment !
>>>D'autres titres pour découvrir Joris-Karl Huysmans :
il faut que je le relise...
RépondreSupprimermerci de m'y faire penser
bises
Salut Mazel,
RépondreSupprimerPuique tu veux le relire, je supposes que tu l'avais aimé toi aussi ?
Et merci pour la visite...
20 ans de PAL, c'est pas mal... je l'ai moi aussi, je crois que c'était Gilles de Rais qui avait attiré mon attention...
RépondreSupprimerNous aurions pu faire une autre lecture commune.
RépondreSupprimerJe n'ai pas dù faire attention lorsque je l'ai vu dans ta PAL, et c'est vrai que de mon côté, je ne l'y avais même pas mis, doutant de le lire un jour...
Mais je me dis que du coup, je lirais bien "A rebours", aussi.
Vraiment chouette ce blog, en plus avec Huysmans, je suis conquise!
RépondreSupprimerMoi je conseille A Rebours, juste formidable!
Merci pour ta visite, Saleanndre. Je suis allée faire un tour sur ton blog, et je constate que nous avons sensiblement les mêmes affinités littéraires... et je compte bien lire A Rebours, après cette belle expérience.
RépondreSupprimerc'est mon livre de chevet. je le possède en version livre de poche. qui peut me dire de quelle peinture voit-on le détail sur la couverture?
RépondreSupprimermerci
josé
Désolée, mais je l'ai lu dans une autre édition dont l'image de couverture est une reproduction du détail d'un tableau de Bosch.
RépondreSupprimerPour celle-ci, je ne sais pas...