"Les hommes protégés" - Robert Merle
Pouvoir au féminin.
Suite à une épidémie mortelle et galopante d'encéphalite ne touchant que les hommes, les femmes prennent le pouvoir... Aux Etats-Unis, Sarah Bedford est désormais à la tête de la Maison-Blanche. Ne vous réjouissez pas... Dans l'univers dystopique de Robert Merle, cet avènement de la souveraineté féminine n'est pas vraiment synonyme de monde meilleur. La nouvelle chef de la plus grande puissance mondiale instaure une dictature insidieuse, fondée sur la haine du sexe opposé, et la volonté d'en éliminer les représentants.
Suite à une épidémie mortelle et galopante d'encéphalite ne touchant que les hommes, les femmes prennent le pouvoir... Aux Etats-Unis, Sarah Bedford est désormais à la tête de la Maison-Blanche. Ne vous réjouissez pas... Dans l'univers dystopique de Robert Merle, cet avènement de la souveraineté féminine n'est pas vraiment synonyme de monde meilleur. La nouvelle chef de la plus grande puissance mondiale instaure une dictature insidieuse, fondée sur la haine du sexe opposé, et la volonté d'en éliminer les représentants.
Autre particularité de la maladie : liée à la spermatogenèse, elle n'atteint que les hommes aptes à la reproduction. Aussi, ceux que l'on appelle les "ablationnistes" (je vous laisse deviner pourquoi...) sont bientôt de plus en plus nombreux à choisir la survie, au dépens de leurs testicules...
Le Dr Ralph Martinelli est ce que l'on appelle un "homme protégé". Confiné à Blueville, dans le vaste domaine de la richissime propriétaire d'une grande firme pharmaceutique, il travaille, ainsi que d'autres éminents membres du corps médical ou de la recherche scientifique, à l'élaboration du vaccin contre l'encéphalite. Il comprend assez vite qu'ils sont en réalité prisonniers d'une hôtesse qui ne se montre jamais, dont ils reçoivent d'acerbes et lapidaires missives à la moindre incartade au règlement rigide qui régit Blueville. Ils n'ont accès à aucun moyen de communication, exceptés quelques journaux effeuillés d'une bonne partie de leur contenu, leurs logements sont placés sur écoute, et ils sont par ailleurs considérés avec mépris par les autres habitants du centre (femmes sentinelles et ablationnistes pour la plupart).
Les visites de la carriériste Anita, sa compagne, constituent le seul contact de Ralph avec l'extérieur. Mais depuis son intégration à l'équipe gouvernementale, elles se font de plus en plus en rares...
Robert Merle traite ce renversement des rôles avec une outrance volontaire, marquant les caractéristiques de ses personnages. Ralph, conformément à ses origines italiennes -!- est un séducteur invétéré, voire un peu macho, et les nouvelles dominatrices affichent la haine ridicule et inquiétante de harpies se vengeant d'anciennes frustrations. De même, de nombreuses scènes se parent d'un caractère théâtral, le contexte tendu servant par ailleurs de prétexte à exhausser l'agressivité des relations hommes-femmes. Tout cela se nuance au fil du récit, notamment avec l'introduction au cœur de ce système tyrannique d'un mouvement clandestin de révolte, et par la relative complexité qu'acquiert les principaux protagonistes.
Il en résulte un roman assez prenant et plaisant à lire, entre farce et thriller, à l'humour parfois cru mais toujours exprimé avec élégance. Les références à la guerre froide le font par moments paraître un peu daté, mais ce n'est pas vraiment gênant...
Je me suis demandé si "Les hommes protégés" répondait à une volonté de l'auteur de s'interroger sur le juste équilibre à trouver pour une véritable égalité homme-femme... mais sachant le chemin qu'il nous reste à parcourir, on peut rassurer M. Merle : la dictature féminine n'est pas pour demain...
C'est souvent que les romans traitant de matriarchat laissent entendre que les femmes au pouvoir ne seraient pas forcément que douceur.:) Je pense personnellement que c'est le problème de ce débat autour de l'égalité des sexes. Les gens pensent souvent "pouvoir" quand ils parlent "égalité", et ce n'est pas du tout la même chose...
RépondreSupprimerTout à fait, vouloir les mêmes droits n'est pas synonyme de volonté dominatrice, nous sommes d'accord, mais Robert Merle nuance ensuite son propos, en mettant en scène des personnages féminins forts mais aussi assez intelligents pour distinguer les deux...
SupprimerCa me rappelle une intervention, à la radio, de je ne sais plus qui à propos de l'égalité des sexes (un homme, il me semble), qui disait que nous aurons vraiment atteint l'égalité homme-femme quand on ne s'offusquera pas que des femmes incompétentes soient au pouvoir !
Je crains le côté daté. C'est un auteur d'une autre génération, même si tout ce que j'ai lu de lui m'a intéressée.
RépondreSupprimerComme je l'écris dans mon billet, ce n'es pas trop gênant, car il fait assez peu référence au contexte historique. C'est juste que ça fait drôle de voir évoquer l'URSS..
SupprimerJe pensais avoir tout lu de ce auteur, mais non. Je dois donc combler cette lacune!!! ^_^
RépondreSupprimerJ'en ai lu pas mal aussi, notamment pendant mes années lycée, et celui-ci m'a été conseillé sur un blog, suite à un billet sur un titre à la thématique approchante, mais je ne sais plus où ni par qui ! J'avais noté L'île aussi chez Brize, que je n'ai pas lu non plus.
Supprimerje le note quand même!
RépondreSupprimerj'ai beaucoup aimé "La mort est mon métier" et j'ai tout le cycle "Fortunes de France" qui m'attend alors un de plus cela ne fera pas vaciller davantage ma PAL :-)
Mais oui, pourquoi pas, j'ai trouvé cette lecture plaisante, et empreinte d'un humour parfois surprenant ! Rien à voir ceci dit avec La mort est mon métier, mais c'est ce qui m'a toujours épatée chez cet auteur, sa capacité à varier les genres... De La mort est mon métier à Malevil, de celui-ci à Un animal doué de raison, on a l'impression qu'aucun de ses titres ne se ressemble...
SupprimerEn lisant ton billet, je cherchais les titres que j'avais lus de cet auteur. Et puis, c'est revenu, évidemment " La mort est mon métier ", puis " L'île " qui m'avait paru violent aussi. Celui-ci m'est inconnu.
RépondreSupprimerAh, j'ai noté L'île que je n'ai pas lu et dont la thématique me tente beaucoup. J'ai découvert cet auteur avec La mort est mon métier, vers mes quinze ans, je pense (bigre, ça remonte un peu !), puis j'en avais lu plusieurs ensuite, et dans mon souvenir, tous m'ont plu (Un animal doué de raison, Malevil, L'enfant-Roi, Week-end à Zuydcoote).
SupprimerMe v'la plus que curieuse. Je pensais Merle complètement empoussiéré, mais à ce que je lis, tout me reste à découvrir. Et puis, tant qu'à être sur ma lancée française, pourquoi pas?!
RépondreSupprimerPourquoi pas, oui... Mais je ne conseillerais pas forcément ce titre pour commencer. La mort est mon métier peut être un bon choix, mais j'avoue que l'ai lu il y a si longtemps que je m'en souviens très peu. Je sais juste qu'il m'avait marquée, à l'époque.
Supprimerje trouve ça drôle car moi, je ne le connais pas du tout et tous les titres évoqués ne me disent rien ! je pense que son idée date un peu ... mais ça m'a fait penser (très bizarrement...) à la série V - les femmes étaient très douces mais aussi au pouvoir très méchantes, bref comme les mecs quoi.... je m'égare, bon week-end !
RépondreSupprimerC'est sans doute que quelques années nous séparent, si tu ne l'as pas lu... et oui, son idée date un peu, mais il y a des pistes de réflexions intéressantes dans sa manière de traiter son sujet.
SupprimerQuant à la capacité des femmes à se montrer aussi odieuses que les hommes, j'en suis malheureusement persuadée, même si je les pense généralement plus enclines à la tolérance et à la compassion..
Robert Merle ne m'attire pas du tout... J'en ai lu quelques-uns mais à part son livre "la mort est mon métier", je n'aime pas trop son style sans style...
RépondreSupprimerMes autres lectures de cet auteur remontent à presque trente ans, mais je ne me souviens pas avoir achoppé sur son style, que j'ai trouvé, dans Le hommes protégés, drôle et élégant..
SupprimerOui, l'auteur de ma génération! Je me souviens quand nous attendions la sortie de notre "Robert Merle de l'année" et les discussions passionnées ensuite. Je les ai tous lus au fur et à mesure qu'ils sortaient. Chaque fois, c'était un débat d'idées.
RépondreSupprimerNon, je ne crois pas que Robert Merle ait été un macho, au contraire. Certes, il veut montrer que les femmes ne sont pas différente des hommes quand elles ont le pouvoir. Le pouvoir corrompt tout être humain.
Mais pour nous, avec la mentalité de l'époque, imaginer qu'une femme puisse devenir présidente des Etats-Unis, c'était impensable, un choc !Nous étions secouées. Du coup, c'était un roman de science-fiction qu'on lisait. Le monde renversé nous faisait rire, penser que c'était le mari qui jouait le rôle du premier monsieur était jubilatoire. Cela nous permettait de mieux comprendre combien nous étions aliénées.
Ceci dit, tu as raison, il n'y a toujours pas de femmes à la présidence des Etats-Unis et encore moins en France. On a encore beaucoup de chemin à faire ! Et surtout il faut veiller à ce que le progrès réalisé ne soit pas remis en cause et annihilé comme le souhaiteraient certains !
La mort est mon métier est un très bon livre sur le nazisme.
Très intéressant, ton témoignage, après celui d'Electra ! Il montre que certains auteurs sont d'une époque, et ont un peu de mal à traverser le temps... Cela ne m'empêchera pas, un jour, de relire Malevil ! Et merci pour ton retour sur ta lecture de ce titre, qui permet de replacer l'oeuvre dans son contexte. Je te rejoins d'ailleurs : il ne m'est pas venu à l'esprit que Robert Merle était macho..
SupprimerMais je ne pense pas qu'une oeuvre cesse d'être intéressante et utile quand la mentalité des gens changent. On la lit différemment, c'est tout ! Et quant à la place des femmes dans la société c'est toujours un sujet de brûlante actualité quand on voit comment elles sont encore esclaves dans certains pays... et même en France quand on voit les inégalités au travail, les femmes battues ...etc.. Donc, Merle n'est pas un auteur à abandonner. Sans compter qu'il a vraiment un talent de conteur, des thèmes universels (comme celui du pouvoir) et l'art d'accrocher les lecteurs avec des personnages qui, malgré leurs défauts, sont très charismatiques. Avec "La mort est mon métier", mon préféré est "L'île". Aucun rapport entre les deux livres. Patrice a raison de souligner l'éclectisme de cet écrivain.
Supprimer"Mais je ne pense pas qu'une oeuvre cesse d'être intéressante et utile quand la mentalité des gens changent" : mais je suis tout à fait d'accord, ce n'est pas de l'intérêt de l'oeuvre que je parlais, mais de celui des lecteurs pour une oeuvre. On se rend compte que certains auteurs, lus à un moment (en l’occurrence, pour Merle, de son vivant), semblent tomber dans l'oubli assez vite, et mal passer l'épreuve du temps, alors que leurs romans abordent en effet des thèmes restant d'actualité..
SupprimerJe n'ai pas lu "L'île", mais je l'ai noté il n'y a pas si longtemps chez Brize, qui a fait paraître un billet à son sujet (mais rédigé par sa fille, si je me souviens bien..).
J'ai lu ce livre il y a une éternité et j'en garde un très bon souvenir, un peu lointain, flou, mais très bon.
RépondreSupprimerAh, mais bien sûr ! C'est CHEZ TOI que j'ai noté ce titre, que tu recommandais dans un commentaire écrit suite à ton billet sur Malevil...
SupprimerJe crois que j'en garderai un bon souvenir aussi, même si je risque d'en oublier assez vite les détails...
Je n'ai jamais lu cet auteur, je ne connais rien de lui. Je ne suis pas sûre d'aimer ce type de roman.
RépondreSupprimerJe ne pense pas que ce titre te plairait, mais Claudialucia a raison sur "La mort est mon métier". C'est un bon livre, je me souviens avoir été marquée à l'époque par le fait d'aborder le nazisme par "l'autre bord"...
SupprimerCe qui me fascine, c'est la grande diversité des ouvrages de l'auteur. Entre ce titre, Week-end à Zuydcoote, ou Fortune de France, quelle éclectisme. Je note ce titre en toute cas (Patrice - Et si on bouquinait ?) et je voudrais lire "La mort est mon métier" en 2020.
RépondreSupprimerJe suis complètement d'accord, il passe de la dystopie à l'Histoire, du futur au passé avec une aisance peu commune.. Je suis curieuse de lire ton avis sur La mort est mon métier, car je l'ai lu il a bien longtemps, et j'en ai gardé peu de souvenir, à part celui du choc que m'avait procuré sa lecture..
SupprimerVoilà un écrivain que je n'ai encore jamais lu, je pensais le découvrir avec Malevil, mais ce sera peut-être avec celui-là. En tout cas c'est pour bientôt, j'ai déjà acheté "L'obscène oiseau de la nuit" de José Donoso. (Goran : https://deslivresetdesfilms.com)
RépondreSupprimerCe roman est plaisant, mais ce n'est pas celui qui me marquera le plus... J'ai préféré Malevil, La mort est mon métier ou Week-end à Zuydcoote.
SupprimerEt je suis très très impatiente de découvrir ton avis sur le Donoso, j'espère que tu le liras bientôt (quelle chance) !!