"La poudre et la cendre" - Taylor Brown

"Il savait qu’ils avaient consacré leur vie à devenir les plus grands tueurs de Yankees du pays et qu’il n’existait que deux choses susceptibles d’assouvir leurs appétits : le sang et l’argent. Il n’avait pas l’argent."

1864, Caroline du Nord. Callum, quinze ans, jeune orphelin ayant connu la maison de correction puis la rude vie de voleur de chevaux, est sauvé d’un naufrage par le vieux Swinney. Ce dernier le prend sous son aile, l’embarquant avec lui dans la bande du Colonel, majoritairement constituée de brutes sudistes, et qui profite du chaos de la guerre dans laquelle le pays est plongé depuis trois ans pour se livrer à diverses exactions. Lors d’une de leurs expéditions, Callum sauve une jeune femme du viol collectif que certains de ses camarades s’apprêtaient à lui faire subir. Ava a dix-sept ans, elle est seule depuis l’engagement de son frère et de son père dans la milice, qui n’en sont jamais revenus. Contraints de prendre la fuite suite à l’assassinat du Colonel, dont Callum est à tort jugé coupable, les deux jeunes gens entament une interminable cavale. 

"La poudre et la cendre" est l’histoire de cette fuite. Une fille, un garçon et un cheval -personnage à part entière du trio-, avec à leurs trousses une troupe de butors menée par un sanguinaire chasseur de primes que son expérience, acquise aux dépens d’esclaves évadés, a doté d’une intuition et d’une connaissance de ses proies quasi surnaturelles. 

Ava et Callum tirent de leur jeunesse et de leur habitude de la dureté la force et l’ingéniosité indispensables pour survivre au dénuement et au danger qui caractérisent leur cavale. Ils dorment la plupart du temps dehors et mangent rarement à leur faim, se fondant dans une nature abondamment évoquée, tantôt rude et tantôt accueillante, dont les manifestations s’amalgament au rythme de leur progression. C’est un périple âpre et halluciné, marqué par l’urgence et la nécessité permanente d’être sur le qui-vive, mais aussi par la faim et la fatigue, par la menace de l’hiver imminent s’ajoutant à celle de leurs poursuivants. Ils traversent des régions exsangues, marquées par le chaos de la guerre, parsemées de cadavres et peuplées d’habitants réduits à l’état de bêtes décharnées.

Et pourtant, malgré la dimension crépusculaire de leur macabre épopée, les deux jeunes héros, parce qu’ils ont gardé, sous leurs manières abruptes, l’innocence et l’aptitude à l’espoir de la jeunesse, et parce qu’ils sont liés par un amour aussi candide que profond, confèrent au roman une pénétrante lumière. 

Taylor Brown immerge son lecteur dans un univers saturé de sensations pas tant contradictoires que diverses, où la violence et la douleur cohabitent avec la beauté et la tendresse comme constituants indissociables d’une même humanité.

A lire !

Une idée piochée chez Kathel