"La neige en deuil" - Henri Troyat
"A ce niveau de haute solitude, l'existence était belle sans raison. Le bonheur n'avait pas de cause. Tout était clair et sûr, sans qu'il fût possible d'expliquer pourquoi."
Ce drame lui a aussi coûté une partie de son intégrité intellectuelle. Il est devenu ce qu’on appelle un homme "simple", oubliant celui, heureux et déterminé, qu’il a été. Dorénavant pétri d’angoisses, hanté par le traumatisme de sa chute, il se contente de peu : ses brebis, sa maison, et le spectacle de ces montagnes qu’il aime toujours autant, et auxquelles il ressemble un peu d’ailleurs, avec sa grande silhouette sèche mais solide et son torse large. Ce n’est pas le cas de Marcelin, de vingt-deux ans son cadet, qu’il a mis au monde puis élevé suite au décès précoce de leurs parents. Toujours à fuir devant l’effort, incapable de garder un travail mais éternellement insatisfait, il n’a qu’une idée en tête : partir vivre en ville. Il faut dire que son frère et lui sont désormais les seuls habitants d’un hameau retiré, où l’électricité n’est jamais arrivée, et que même le village voisin est isolé du reste du monde par la neige la moitié de l’année.
Pour réaliser son projet, Marcelin finit par convaincre Isaïe de mettre leur maison en vente, ce que ce dernier, s’imaginant incapable de vivre ailleurs, n’a consenti que parce qu’il a du mal à refuser quoi que soit à son frère, et avec l’espoir que ce dernier finirait par changer d’avis.
Mais la maison ne se vend pas.
L’improbable tragédie qui survient dans ce coin perdu des Alpes offre à Marcelin une autre occasion de s’enrichir… un avion venu d’Inde, en route pour l’Angleterre, s’est écrasé sur les sommets, et contiendrait de l’or. L’expédition menée pour tenter de secourir des passagers s’est soldée par un échec, et la mort d’un des sauveteurs. Nous sommes en novembre, l’hiver a été précoce, conditions peu propices à l’escalade…
Pourtant, à force de supplication et de chantage affectif, Isaïe cède une fois de plus à son frère, et tous deux se lancent dans un périple hautement périlleux, affrontant un univers minéral hostile, et d’une verticalité quasiment infranchissable.
Le texte est resserré, bref mais intense, empreint d’une ampleur tragique qu’exhausse l’omniprésente évocation de cet univers montagneux à la fois terrible et grandiose. Dans cet environnement implacable, l’homme est ramené à sa petitesse en même temps qu’à sa valeur, à une essentialité où les choix deviennent d’une binarité existentielle : la mort ou la vie, le bien ou le mal…
On va dire que ces escapades, je les ai encore ratées... pas trop montagne on va dire, en général.
RépondreSupprimerTroyat est souvent présent dans les boîtes à livres, mais j'avoue ne l'avoir jamais lu. Celui-ci a l'air pas mal, malgré certaines limites.
RépondreSupprimerJ'ai lu quelques romans d'Henri Troyat quand j'étais adolescente mais plutôt ceux ayant un lien avec la Russie. Je ne m'en souviens plus très bien mais son style doit être assez évocateur car j'ai longtemps été fascinée par ce pays.
RépondreSupprimerMerci pour ta participation avec ce grand classique des histoires de montagne. J'avais peur que le récit ait vieilli, mais à te lire la plume de Troyat n'a pas perdu de son mordant.
RépondreSupprimerMerci pour cette découverte, je vais l'essayer.
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