"Rhapsodie balkanique" - Maria Kassimova-Moisset
"Miriam (...) pouvait apparaître comme un sentiment et disparaître comme une pensée."
Todor y tient une épicerie. C’est un homme occupé, souvent absent, dont la femme et les enfants ont à peine le temps, le matin, d’apercevoir la silhouette habillée du tablier qu’il vient d’enfiler avant de se rendre à son magasin. Un tablier bien blanc. Le lavage du linge, ponctuant toute l’histoire familiale et découpant la journée, est une des principales occupations de la mère, Theotitsa, qui s’y adonne en respectant chaque jour la même exacte routine avec une dévotion quasi religieuse. Par ailleurs bigote, à sa manière toute personnelle, émaillée de superstitions, c’est une femme dure, asséchée par la perte de trop nombreux enfants. Une douleur qu’elle entretient en secret, en se plongeant dans le coffre où elle a entreposé les reliques attestant du passage trop fugace dans l’existence de chacun d’eux. Seuls deux garçons, dorénavant presque adultes, ont survécu.
Et puis arrive Miriam, conçue durant "l’unique nuit des vagues gelées de la mer" -diabolique présage, selon certains-, que Theotitsa refuse de laisser partir. C’est une enfant précoce, intelligente, qui a hérité de sa mère (qui ne l’admettrait pour rien au monde) un étrange don de prémonition. C’est ainsi qu’elle prévoit entre autres la future naissance de Mila, qui sera de neuf ans sa cadette. "Fille de braise" selon sa propre mère, théâtrale et débordante de vie, passant son temps à braver les interdits, Miriam construit avec sa petite sœur une relation fusionnelle.
Elle brave un jour l’interdit de trop en s’éprenant de Mohamed, jeune vendeur de limonades originaire de Turquie. Ses frasques ne font plus sourire personne. Les deux tourtereaux ne se réclament d’aucune religion, si ce n’est celle de leur amour, mais ne peuvent échapper aux diktats de leurs communautés respectives, et à l’intolérance de la famille de Miriam, qui refusent cette union. La jeune femme résiste. C’est la rupture. Le couple, ostracisé, doit quitter Bourgas pour survivre. Miriam et Mohamed partent à Istanbul, ville de promesses qui ne seront pas tenues…
Le récit se construit par fragments au fil d’allers-retours temporels, et est régulièrement entrecoupés d’intermèdes où l’auteure entretient des conversations imaginaires avec ses personnages, inspirés de ses ascendants -Miriam était sa grand-mère paternelle. Elle les y interroge sur leurs choix, notamment ceux qu’elle peine à comprendre, et sur les pans inconnus de ce passé familial, ce procédé lui permettant en quelque sorte d’exposer au lecteur l’enjeu du roman : se réapproprier grâce à la fiction une histoire dont elle n’a hérité que de rares bribes, en combler les "trous". Ces passages m’ont agacée, en me donnant l’impression que Maria Kassimova-Moisset s’imposait dans le texte pour fournir des explications superflues sur sa démarche, interrompant mon immersion dans l’intrigue. Quant à ladite intrigue… si j’ai apprécié le personnage lumineux de Miriam et le récit de sa douloureuse quête d’émancipation, j’ai trouvé le dernier tiers du roman assez invraisemblable, et la conclusion m’a complètement laissée sur ma faim.
Oh mince, quel dommage. Je fais partie des gens ayant beaucoup aimé. J'ai même pas émis de bémol.
RépondreSupprimerTant pis, ça fera toujours un livre de moins dans ta bibliothèque !
Et j'avais un a priori très positif... mais je n'ai pas accroché aux choix narratifs..
SupprimerJe l'ai lu pendant l'été et comme je le présente sur mon blog lundi je rajouterai ton lien mais je ne lis pas ta chronique car la mienne n'est pas tout à fait terminée. Je tombe juste sur ta dernière phrase, déçue ? moi j'en fais un coup de coeur !
RépondreSupprimerJe ne suis pas trop étonnée, je n'avais lu que des avis enthousiastes à son sujet...malheureusement, une rencontre ratée en ce qui me concerne. Ca arrive...
SupprimerDéjà que ça ne m'attirait pas, là c'est cuit. ^_^
RépondreSupprimerJ'étais à l'inverse très attirée...
SupprimerC'est vrai que j'en avais lu de très bons avis mais les bémols que tu soulignes me refroidissent un peu...
RépondreSupprimerJe n'ai réussi à aucun moment à être vraiment dedans...
SupprimerJe suis avec attention les billets sur la littérature bulgare, car je n'ai rien trouvé à lire pour cette activité. Enfin, j'en ai abandonné deux, mais très tôt, sans savoir si ça venait du livre ou de moi.
RépondreSupprimerLes titres bulgares traduits ne sont pas pléthore, en effet, même si Sacha nous a concocté une belle liste de suggestions (ainsi que Claudialucia). Ce n'est que le 2e titre que je lis en provenance de ce pays, j'avais beaucoup aimé le premier (Mères de Teodora Dimova).
SupprimerJ'ai fait une tentative de lecture, et j'ai abandonné après une quarantaine de pages. Le ton ne me plaisait pas du tout et je ne me suis pas forcée. C'est donc intéressant de lire ton avis un peu négatif.
RépondreSupprimerEt ton commentaire me rassure, j'avais l'impression d'être la seule à ne pas avoir accroché...
SupprimerJe fais aussi partie de la team qui avait bien aimé le roman. Je l'ai lu à sa sortie. J'ai été touchée par les personnages
RépondreSupprimerLes personnages sont touchants, je ne le nie pas, mais j'ai eu du mal avec le style et avec quelques raccourcis de l'intrigue.
Supprimerun véritable coup de cœur pour moi, je l'ai lu en octobre 2023, et je dois faire partie des gens qui t'ont tentée (hélas pour toi) , j'ai beaucoup appris grâce à la description des intolérances qu'elles soient bulgare ou turque.
RépondreSupprimerOn ne peut pas gagner à tous les coups... mais ce n'est pas grave, cette lecture m'a au moins permis de participer à la Rentrée à l'Est et aux Escapades européennes. Je pensais au départ le proposer aussi pour "Sous mes pavés", mais contrairement à ce à quoi je m'attendais, Istanbul est finalement très peu évoquée..
SupprimerJ'étais assez intriguée par ce roman jusqu'à présent, mais avec ta déception, je vais laisser passer.
RépondreSupprimerMa lecture un peu laborieuse aura au moins servi à ne pas faire croître la pile de quelques lectrices :).
SupprimerJe suis en train de le lire. Je ne suis guère emballée. Anne-yes
RépondreSupprimerAh, je me sens moins seule.. j'attends ton avis avec impatience !
SupprimerLes intermèdes ne m'ont pas gênée, je les ai même plutôt appréciés. C'est le reste qui m'a souvent ennuyée.
SupprimerIl m'arrive souvent d'être déçu après avoir lu des avis très positifs !
RépondreSupprimerDes goûts et des couleurs...
SupprimerPatrice a beaucoup aimé ! :)
RépondreSupprimerJe crois d'ailleurs que c'est suite à son billet que j'ai noté ce titre...
SupprimerJ'ai failli le sélectionner pour le rendez-vous bulgare, mais le temps m'a fait défaut. Sans regret alors.
RépondreSupprimerLe sujet et le contexte sont très intéressants, et j'ai apprécié certaines trouvailles assez inventives... mais dans l'ensemble, j'ai eu comme Miss Sunalee du mal avec le ton, et la fin m'a vraiment laissé un sentiment d'inachèvement...
SupprimerJe n'avais lu que des avis positifs, mais je vois qu'il y a eu aussi des abandons et des avis mitigés. Les interventions de l'autrice ne m'avaient pas gênée, au contraire, et j'ai beaucoup aimé le personnage de Theotitsa, une vraie héroïne de tragédie grecque.
RépondreSupprimerCes interventions m'ont donné l'impression qu'elles nous mettait "les points sur les i", et que c'est surtout à elle qu'elles étaient utiles, finalement... mai certains personnages sont en effet bien campés, je l'admets.
SupprimerTrop de bémols, ma PAL trop corpulente te remercie :)
RépondreSupprimerA ton service !
SupprimerTu as tout de même trouvé quelques points positifs.
RépondreSupprimerOui, j'ai dans l'ensemble apprécié les personnages, notamment.
Supprimerje l'ai aimé et fait lire autour de moi; et tout le monde l'a bien apprécié
RépondreSupprimerJe suis ravie que ce roman ait trouvé son public, je ne nie pas ses qualités.. mais la rencontre ne s'est pas faite en ce qui me concerne..
SupprimerLe sujet avait l'air intéressant mais si l'autrice s'immisce partout ça ne me convient pas non plus.
RépondreSupprimerDisons que dans les parties "romanesques", elle s'efface. Mais régulièrement, on a droit à un paragraphe om elle dialogue avec ses personnages, explique ce qu'elle est en train de faire, demande des explications sur telle ou telle décision prise par l'un d'eux.. j'ai trouvé ça lourd.
SupprimerDéjà que je peine à caser une petite lecture pour participer à la rentrée à
RépondreSupprimerl'est, je ne vais pas retenir ce texte ! Pourtant, les fragments, les
brides, j'aime bien en général mais il faut quand même que ça se tienne. ça
me fait penser à ma tentative de lecture de Mon vrai nom est Elizabeth,
tout le monde aime, et toi, rien à faire, ça n'accroche pas.
Je n'ai lu à part ce titre que "Mères" de Teodora Dimova, en littérature bulgare. J'avais beaucoup aimé, et là aussi, le texte est construit sur une succession de fragments...
SupprimerLa première déçue par le livre ! Comme je ne l'ai pas lu, je ne peux pas te dire si je suis d'accord avec toi ! Mais personne ne lit les classiques bulgares ! Allez ! un bon mouvement ! Sous le Joug de Vazov ou Les cent frères de Manol de Dontchev !
RépondreSupprimerJ'aurais aimé participer davantage, mais je n'ai finalement pas réussi à caser plus d'un titre bulgare dans un programme de lectures déjà bien rempli par toutes les activités fort tentantes proposées ici et là !
SupprimerMerci pour ta participation, J'ai rajouté un lien vers ton blog dans le bilan.
RépondreSupprimerMerci à toi, je vais précieusement garder la liste de titres de ton bilan...
Supprimerah je l'avais repéré mais ton billet et les avis de Sunalee et d'autres lecteurs me disent que non, je peux passer mon chemin, j'aurais sans doute eu les mêmes bémols....moi en roman bulgare, je retiens Wunderkind que j'avais vraiment beaucoup aimé (j'ai publié un billet sur mon blog)
RépondreSupprimerOui, passe.. franchement, plus le temps m'éloigne de cette lecture, et moins j'en garde un bon souvenir.. et je vais aller lire ton avis sur ce "Wunderkind".
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