LE RECAPITULATIF DE L'ACTIVITE

"Allah n'est pas obligé" - Ahmadou Kourouma

L'enfant, la guerre et la mort...

Contrairement à ce que l'on pourrait croire en découvrant que le narrateur en est un enfant, le roman d'Ahmadou Kourouma est un texte abrupt, aussi bien sur le fond que sur la forme.

Birahima, garçon malinké d'une petite dizaine d'années, nous raconte son "blabla", sa "vie de merde". A la mort de sa mère, il quitte la Côte-d'Ivoire accompagné de Yacouba, un féticheur musulman boiteux, pour retrouver sa tante Mahan, devenue, par décision des chefs du village, sa tutrice. Cette dernière vit au Liberia.

A peine entrés dans ce pays en proie à la guerre, Birahima est enrôlé comme enfant-soldat par une des factions combattantes pendant que son compagnon est engagé comme "grigriman". Leur périple va ensuite les emmener jusqu'en Sierra Leone, les immergeant dans un univers de chaos, dans lequel ils survivent en se faisant successivement recruter par divers chefs de guerre. 

Des chefs de guerre qui s'affrontent, mais partagent une valeur commune, celle de la barbarie. Viols, tortures, anthropophagie... Birahima devient témoin de cette folie dont semblent pris les hommes, et côtoie une mort devenue familière, celle notamment des enfants qui combattent à ses côtés, et dont parfois il nous raconte, à l'occasion d'une triste oraison, la sordide existence... 

Il évoque cette noire épopée avec un détachement candide sous lequel affleurent parfois un chagrin qui le dépasse et qu'il fait taire avec une brusque colère, et une fausse naïveté qui rend son propos d'autant plus glaçant. 

Il se montre aussi, par moments, didactique, éclaire le lecteur profane sur le contexte géopolitique des pays qu'il traverse, en expliquant avec ses mots d'enfant la corruption, les manigances et la brutalité des adultes au pouvoir, en pointant les responsabilités non seulement des gouvernements africains, des chefs de clan ou des responsables religieux, mais aussi des ONG et de certains états occidentaux, dans le mûrissement d'une situation devenue inextricable. Il exprime ainsi une vérité crue, dénonce entre autres la bêtise des antagonismes tribaux, l'immoralité des individus au pouvoir, et surtout l'absurdité cruelle de conflits dont les victimes sont toujours les mêmes, ces enfants déjà brutalisés par la vie, que l'on séduit avec la promesse de posséder "un kalachnikov", et dont on entretient la motivation à coups de drogues. Tout cela pour finir, dans l'indifférence générale, en chair à canon...

Ce sujet particulièrement douloureux est de plus servi par une écriture heurtée, composite, qui mêle parler "petit nègre", expressions enfantines ou indigènes et langue parfois soutenue, le tout fréquemment entrecoupé de parenthèses dont le contenu, issu de divers dictionnaires, explicite certains termes ou formulations à l'attention des lecteurs que leurs origines diverses pourront empêcher de les comprendre.

Ce procédé finit par devenir lassant, et rend la lecture fastidieuse. Aussi, j'avoue avoir parfois lâché prise, notamment lorsque ce style accompagne les explications détaillées que nous livre le narrateur sur la situation politique de ce coin d'Afrique où il perd définitivement son innocence...

Commentaires

  1. j'avais tenté de le lire mais comme tu le dis, la lecture fut fastidieuse dès le début :(

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    1. Oui, je comprends... et c'est dommage parce que la thématique est intéressante.

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  2. Je l'ai lu il y a très longtemps, quasiment à sa sortie, et je crois que j'ai ressenti le même effet lassitude que toi.

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    1. Je me sens moins seule... j'avoue avoir du mal à comprendre le parti de l'auteur, qui a fait un choix stylistique assez particulier, et qui n'a pas su vraiment le doser, selon moi (l'histoire des définitions, ça peut être sympa, mais quand il y en a plusieurs à chaque page, ça devient vite lassant...).

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  3. Je ne sais pas pourquoi, mais je passe :-) (Goran : http://deslivresetdesfilms.com)

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