"Flush : une biographie" - Virginia Woolf
"Il est naturel qu'un chien toujours couché avec la tête sur un lexique grec en vienne à détester d'aboyer ou de mordre; qu'il finisse par préférer le silence du chat à l'exubérance de ses congénères et la sympathie humaine à toute autre."
Il y reçoit une éducation urbaine et "civilisatrice", faisant notamment l’apprentissage de la laisse, ou intégrant la stricte hiérarchie sociale des chiens londoniens. Sacrifiant -mais il n’a pas vraiment le choix- au profit de sa maîtresse le soleil, l’air et son courage, il devient un chien d’intérieur. En même temps, un lien très fort se tisse peu à peu avec Miss Barrett, un "compagnonnage de plus en plus profond", au gré de l’instauration de rituels affectueux, qui cimentent sa fidélité. Ce bonheur est bientôt troublé par l’arrivée régulières de lettres qui mettent Miss Barrett en émoi, et la détourne de Flush, envers lequel elle se montre moins attentive.
Ce n’est que le début d’une longue existence au cours de laquelle Flush connaîtra de sombres mésaventures et de grandes joies, partira vivre en Italie où, renouant avec la vie en plein, air il jouira d’une seconde jeunesse, et découvrira une communauté canine bien plus démocratique que celle de son pays d’origine.
Si Virginia Woolf a pris le parti d’une narration à la troisième personne qui assoit la crédibilité du récit, elle traite son héros comme un personnage à part entière, avec une personnalité complexe, détaillant ses réflexions comme ses émotions, ainsi que la manière dont ses expériences et ses rencontres le font évoluer. Les odeurs occupent bien sûr une place prédominante dans sa perception du monde, ainsi qu’une hypersensibilité aux ambiances et aux humeurs qui font de Flush un fin psychologue, à l’inverse des humains qu’il côtoie, dont le manque d’intuition l’épouvante, et c’est prétexte, de la part de l’auteure, à un humour aux accents facétieux.
C‘est une vie de chien dans toute sa dimension domestique, marquée par la force et l’exclusivité du lien qui attache l'animal à son maître, mais aussi par la solitude que peut induire cette dépendance, cette proximité avec l’humanité ayant profondément modelé la caractère et le comportement canins. Inévitablement, il y est donc aussi question d’humains. A travers la biographie de Flush, Virginia Woolf évoque celle de sa maîtresse, la poétesse Elizabeth Barrett Browning, qui dût se libérer des carcans d’une société victorienne caractérisée par sa rigidité sociale et sa tyrannie patriarcale, et fuir une vie citadine sclérosante qui aurait sans doute fini par lui être fatale…
Un bon roman "le récit est plaisant à lire grâce à l’idée lumineuse de l’écrivaine, raconter par le prisme de la vison d’un chien. Ca nous vaut beaucoup d’humour, sans pour autant cacher des points beaucoup plus sérieux...."
RépondreSupprimerC'est très bien résumé !
SupprimerPas de souci, déjà noté (mais en réserve à la bibli...)
RépondreSupprimerIl est sinon disponible chez Folio pour 2 euros !
SupprimerComme j'ai pratiquement tout à lire de Virginia Woolf, je note de commencer par Les vagues puis cet opus. (mais je suis plus attirée par Flush car je crains les circonvolutions que tu aimes tant).
RépondreSupprimerC'est certain Flush est beaucoup plus facile à lire....
SupprimerJe ne sais pas si commencer par Les Vagues est une bonne idée.. d'ailleurs, dans son billet, récent, sur ce titre, le Bouquineur le déconseille ! Je crois que Mrs Dalloway est pas mal, pour découvrir l'auteure...
SupprimerMoi aussi j'attends les phrases, avec ses flux habituels, et là ... que nenni. Passé cette petite déception, j'ai bien apprécié ce texte charmant.
RépondreSupprimerIl reste en effet très plaisant, même si c'est pour son style habituellement plus tortueux qu'on apprécie en grande partie l'auteure.
SupprimerBravo pour ce triplet et cette découverte intéressante. Depuis le temps que je veux replonger dans les écrits de Virginia Woolf, je pourrai peut-être me décider avec de texte court...
RépondreSupprimerIL est facile à lire, alors oui, pour entamer une re-découverte de l'auteur en douceur, il est tout à fait approprié..
SupprimerLire ton billet me remet cette très chouette lecture en tête, et me donne le sourire aux lèvres en pensant aux observations si fines de Flush sur le genre humain. Un vrai bonbon mais qui parle bien de l'aliénation féminine.
RépondreSupprimerJ'ai apprécié l'aspect malicieux que donne au texte les observations de Flush sur ces balourds d'être humains... mais cela n'empêche pas, comme le souligne Le Bouquineur, que l'auteure y aborde des sujets tout à fait sérieux, c'est vrai.
SupprimerNous avons eu la même lecture pour le challenge "Les classiques c'est fantastique". J'ai beaucoup aimé cette nouvelle où on retrouve tout l'humour de Virginia Woolf. Un très beau moment de lecture pour ma part.
RépondreSupprimerJe risque d'avoir un peu de retard pour mon billet. Grippe depuis hier. Je lirai aussi le tien lorsque la fièvre sera retombée. Pour l'instant, tisane et bouillotte!🤧
RépondreSupprimerPas de souci, j'attends !! Soigne-toi bien, la grippe est virulente cette année, paraît-il...
SupprimerAh, un court texte ! Voici une motivation supplémentaire pour découvrir ce texte sans trop d'appréhension !
RépondreSupprimerExactement, il est court et il se lit surtout très facilement, alors que le style qu'elle déploie dans ses autres romans en rend la lecture parfois un peu laborieuse (mais malgré tout délicieuse)..
Supprimerje n'ai lu que des nouvelles d'elle et j'ai été très déçue mais je suis trop curieuse pour Flush (je veux le lire en anglais mais je repousse l'achat LOL) car je trouve ce choix narratif excellent (et je pense à mon chien)
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