"Pukhtu – Secundo" - DOA

"Un jour tu t’aperçois que tu joues plus. Plus jamais. Tout est grave. Et c’est ça qui te tue."

On retrouve dans "Pukhtu - Secundo" les hommes de Voodoo, membres d’une société privée assistant les forces américaines dans leur combat contre le terrorisme en Afghanistan, et qui tirent profit du regain de la culture du pavot pour se préparer une retraite prospère. Ils ont toujours dans leurs pattes le reporter Peter Dang, de retour après un bref séjour dans son Canada natal où sa mère vieillissante perd la tête. Sher Ali Kahn, qui poursuit toujours les assassins de ses enfants, a réussi à capturer l’un des acolytes de Voodoo. 

Mais l’auteur braque aussi sa focale sur certains personnages qui n’étaient qu’effleurés dans le premier opus.

A Paris, la journaliste Amel Balhimer, devenue très proche de Chloé, la maîtresse d’Alain Montana, ancien de la DGSE dont elle veut se venger, commence à tirer le fil européen du trafic d’héroïne afghan, auquel sont entre autres mêlés d’ex-membres de l’UCK, mouvement indépendantiste kosovar formé avec la bénédiction de l’Ouest pour combattre les serbes. La plupart des cadres de cette organisation sont redevenus des partenaires criminels de leurs voisins albanais, gérant la logistique transcontinentale de divers produits illicites venant notamment d’Asie centrale… 

Au Mozambique, où nous retrouvons un couple de restaurateurs entraperçu dans "Pukhtu – Primo", survient un drame qui réunit les acteurs d’une vieille et opaque affaire enterrée par les services secrets français (j’ai réalisé après coup que c’est celle dont il est question dans "Citoyens clandestins", lu il y a trop longtemps pour que je fasse le lien)…

Ce second opus, explosif, du diptyque, est donc celui de revenants et de retrouvailles (pour le meilleur et pour le pire) pour de nombreux personnages, celui où les multiples pans de la fresque minutieusement élaborée par DOA prennent leur place, livrant une vue d’ensemble aussi dense qu’époustouflante de cohérence, et une intrigue éminemment haletante. 

Le contexte n’en est pas négligé pour autant. L’objectif fixé par les alliés en envahissant l’Afghanistan -lutter contre le terrorisme et aider au développement du pays- est loin d’être atteint, et les Etats-Unis s’y enlisent, peinant à reconnaître l’énormité et le coût -des milliards de dollars et des centaines de morts- de l’erreur commise en s’obstinant à rester. La population, coincée entre le marteau fondamentaliste et l’enclume étrangère, soutien d’un pouvoir corrompu ayant promis beaucoup et donné peu, a perdu toutes ses illusions et est terrorisée, entre les exécutions sommaires et la crainte permanente de sauter sur une mine ou de voir son enfant déchiqueté par une bombe, l’angoisse d’être racketté par agents de l’Etat ou emprisonné de façon arbitraire.

On ressort de cette lecture de longue haleine admiratif de l’ampleur et de la précision de l’œuvre, qui a dû nécessiter un énorme travail de documentation, ainsi que de la capacité de l’auteur à effacer toute trace dudit travail, mais aussi quelque peu soulagé de sortir enfin de cet univers ténébreux…


D’autres titres pour découvrir DOA : La ligne de sang – Citoyens clandestins

C’est un épais pour Tadloiducine (800 pages chez Folio), et donc un pavé pour Sibylline et Moka…  

Commentaires

  1. Bon, tu as poursuivi, ce doit être vraiment une lecture nécessaire?

    RépondreSupprimer
  2. C'est donc un diptyque, pas les début d'une série ? Concernant le travail de documentation, je m'étais fait la même remarque que toi en lisant Citoyens clandestins. C'est assez plaisant pour le lecteur d'être traité comme une personne intelligente.

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Compte tenu des difficultés pour certains d'entre vous à poster des commentaires, je modère, au cas où cela permettrait de résoudre le problème... N'hésitez pas à me faire part de vos retours d'expérience ! Et si vous échouez à poster votre commentaire, déposez-le via le formulaire de contact du blog.