LE RECAPITULATIF DE L'ACTIVITE

"Tristesse de la Terre" - Eric Vuillard

"Il n'y a rien de plus beau que le spectacle".

Avec le recul, et l'écrémage opéré par le travail sélectif de ma mémoire, il me reste de "Tristesse de la terre" comme une succession de flashs, de clichés sépia formant une mosaïque à la tonalité mélancolique.

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... années 1880-1890... Buffalo Bill monte le Wild West Show, spectacle qu'il va présenter au cours d'une longue tournée qui les amènera, lui et sa troupe, jusque de l'autre côté de l'Atlantique. Il faut dire que c'est un Show impressionnant, inédit, nécessitant des tonnes de matériel, monopolisant des dizaines de figurants et de chevaux qui y rejouent, dans un décor aux dimensions hors normes, cet épisode épique et fantasmé qu'est la conquête de l'Ouest. La présence, parmi eux, de véritables indiens, et notamment du célébrissime Sitting Bull, ce vainqueur de Little Big Horn que Buffalo Bill a sorti de sa réserve, en est sans doute la principale attraction...

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... à l'heure de la révolution industrielle, ce spectacle, entre folklore et propagande, premier grand divertissement de masse, a déjà un goût de nostalgie de pacotille, il alimente les rêveries de ceux qui finissent par se persuader qu'ils y étaient, et fait écho au besoin de de se raccrocher à un passé fondateur et glorifiant...

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... la scénographie imaginée par Buffalo Bill est comme un prémisse de la façon dont sera revisitée, au fil des décennies, l'histoire de son pays, pour qu'elle devienne un mythe au service de la grandeur et du rêve américain. Les indiens n'y sont pas les victimes d'un envahisseur avide, arrogant et violent, mais les vaincus d'une guerre qu'ils ont perdue, malgré leur bravoure et leur prestance, parce qu'ils lui étaient inférieurs. 

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... la solitude de Sitting Bull, plus pesante parmi la foule qu'au coeur de sa forêt, parce qu'il s'y sent prisonnier, qu'il a été dépossédé de lui-même...


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... la solitude de Buffalo Bill, née de cette angoisse de n'avoir pas vraiment vécu, de n'être qu'une coquille vide, lui qui est finalement devenu son personnage, personnage bâti sur des fanfaronnades d'arsouille, des exubérances de bonimenteur...

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... et la tristesse, oui, profonde et amère, face à l'humiliation subie par ces indiens condamnés à rejouer leur propre destruction, face à la facilité avec laquelle la foule se laisse séduire par ce monde de carton-pâte, face à la force de conviction du spectaculaire aux dépens de la sincérité, face au fait que l'on puisse voir dans un génocide une épopée héroïque, que l'on puisse tirer de la souffrance et du mépris de l'autre matière à divertissement...

Commentaires

  1. Réponses
    1. Moi aussi, même si je ne suis pas persuadée d'en garder, sur du long terme, un sentiment marquant.

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