LE RECAPITULATIF DE L'ACTIVITE

"L'île du docteur Moreau" - Herbert George Wells

"Je n'ose espérer que la terreur de cette île me quittera jamais entièrement."

Quand La petite liste et Ta d loi du cine ("squatteur" chez Dasola) ont annoncé l’organisation d’un mois consacré à Herbert George Wells, j’ai d’abord rapidement décidé de passer mon chemin, échaudée par mon unique expérience avec cet auteur, celle de la lecture plombée d’un mortel ennui de "La guerre des mondes" (que je n’ai même pas pris la peine, à l’époque, de chroniquer ici).

C’est une allusion de Keisha de "L’île du docteur Moreau" qui m’a ensuite fait changer d’avis… c’était pour moi le genre de titre que l’on a l’impression de connaître sans l’avoir jamais lu. C’était donc l’occasion de m’instruire un peu !

Le lecteur est d’emblée projeté dans un contexte étrange et inquiétant, au fil de la voix du narrateur Edward Prendick, qui suite à un naufrage dont il est le seul rescapé, a été recueilli à bord d’un navire "sale et rapiécé". Y évolue, outre un équipage aux manières brutales, un individu au faciès difforme, sa face noire évoquant un museau, sa bouche immense contenant les dents les plus grandes qu’il ait jamais vu dans une bouche humaine. L’étrange créature semble être le domestique de Montgomery, passager qui s’est occupé de soigner Prendick.

A la suite d’un conflit avec le capitaine qui refuse de le garder à bord, le héros est contraint de débarquer, en compagnie d’un grand vieillard qui aurait visiblement préféré le laisser se noyer, et de Montgomery, qui le sauve une fois encore en avançant que les connaissances scientifiques de Prendick pourraient leur être utiles, sur une île isolée et éloignée des routes maritimes, que son protecteur qualifie d’endroit infernal.

Prendick comprend vite pourquoi… le lieu est peuplé d’êtres estropiés et difformes qui semblent vivre à l’état sauvage. Et lorsqu’il apprend l'identité du grand vieillard, il fait vite le lien avec le scandaleux docteur Moreau que ses pairs avaient répudié suite aux expériences qu’il menait dans son laboratoire, y pratiquant la vivisection sans aucune limite éthique… Ont d’ailleurs débarqué sur l’île, en même temps que les trois hommes, une flopée de lapins et un puma que le docteur s’empresse de torturer, provoquant d’insupportables et interminables hurlements de douleur de la part de l’animal.

De quoi faire froid dans le dos, hein ? Il faut dire que H. G. Wells s’y entend pour entretenir l’angoisse et la tension, notamment par la précision de ses descriptions, et ce qu’il évoque un épisode de poursuite ou les questionnements horrifiés du narrateur sur les événements qu’il subis. Et si les ficelles des éléments horrifiques de l’intrigue sont plutôt grossières (les expériences pratiquées par Moreau et leur résultat ne sont guère crédibles), le rythme du récit -passant habilement de la frénésie à une torpeur oppressante et macabre- et la consistance de l’atmosphère embarquent le lecteur sans peine. 

Par le personnage du docteur Moreau, H.G. Wells introduit une amorce de questionnement sur la difficulté à concilier science et éthique mais aussi à définir cette dernière, ainsi que sur ce qui caractérise l’être humain à l’aune de ce qui le distingue, mais aussi le rapproche, de l’animal. Toutefois, développer ces thématiques n’est visiblement pas l’objectif de l’auteur : les expériences du docteur Moreau, ne visant ni avancée médicale, ni atteinte d’un mieux-être humain ou animal, ne suscitent aucune adhésion.

Le récapitulatif du mois Herbert George Wells en cliquant sur l'image ci-dessous :


Et cette lecture me permet par ailleurs de participer une nouvelle fois au Mois Anglais.


Commentaires

  1. Encore déçue, alors? J'avais commencé la relecture de cette île, mais un billet complet m'en a dissuadée, car je savais à quoi m'attendre! trop affreux comme ambiance.

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    1. Non non, pas déçue, comme je l'indique dans mon billet, je me suis facilement laissé prendre à la tension croissante, à l'ambiance angoissante. Au final, j'ai plutôt passé un bon moment.

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  2. À chaque billet sur un titre de Wells, je me repose les mêmes qestions : l'ai-je lu ? ou ai-je lu une adaptation ou vu un film ? Je ne sais jamais. Je ne pense pas avoir lu celui-ci, même si je connais le propos, vu que les créatures du docteur apparaissent dans certains comics.
    Nathalie

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    1. C'est en effet le genre de titre qu'on peut penser avoir lu même si ce n'est pas le cas, tant le thème et les créatures de Wells font partie de l'imagerie horrifique..

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  3. Je n’avais moi non plus aucune envie de relire cet auteur et même ce que tu dis de ce roman ne me tente guère. Je trouve que la science fiction vieillit mal.

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    1. Ce titre ne s'en tire pas mal je trouve : comme je l'écris dans mon billet, le propos relevant purement de la SF peut en effet paraître vieilli car un peu grossier, mais la dynamique du récit et le questionnement induit font qu'on ne s'arrête pas vraiment aux détails peu crédibles..

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  4. Ce titre, je suis sûre de ne pas l'avoir lu, par contre je me souviens vaguement d'un film...

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    1. Je n'ai vu aucune de ses adaptations (je crois qu'il y en a eu plusieurs), mais ça me dirait bien...

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  5. Je n'avais jamais lu celui-là et j'ai été assez choquée. On a quand même pas mal évolué depuis le début du 20ème siècle et tant mieux pour les animaux !

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    1. Ton commentaire fait écho à ma lecture en cours ("Entre fauves" de Colin Niel), dans laquelle on se rend malheureusement que nous n'avons pas tous évolué tant que ça, et que -sans vouloir être pessimiste- notre prise de conscience arrive pour beaucoup d'espèces un peu trop tard...
      Mais c'est vrai que dans l'ensemble, notre regard sur l'animal a (heureusement) changé, notamment par la reconnaissance de son statut d'être vivant susceptible d'éprouver de la souffrance.

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  6. Une lecture marquante... j'en garde un souvenir impérissable !

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    1. Je n'en suis pas surprise, c'est un roman prenant, à la tension palpable.. (et assez horrible, il faut bien le dire !).

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  7. Oui j'ai vu les films...mais j'avoue que l'ambiance assez noire m'a refroidie pour la lecture

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    1. Et le roman est en effet bien noir, et bien tendu !

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  8. J’ai lu Wells il y a très, très longtemps…. Aujourd’hui, il ne me reste que des souvenirs plus ou moins flous, un « ressenti ». Ce roman « L’ile du docteur Moreau » était mon préféré à l’époque mais il me semble qu’il faudrait que je relise « La guerre des mondes » qui a plus de profondeur ?

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    1. Comme je l'indique dans mon billet, "La guerre des mondes" et moi, ça a été un rendez-vous complètement raté, mais je suis sûre que tu prendrais du plaisir à relire les aventures de Prendick chez les "monstres" du docteur Moreau !

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  9. J'ai moi aussi été très déçue par La Guerre des mondes, ça fait trois mois que je l'ai lu et je n'ai toujours pas écrit ma chronique. Mais La Machine à explorer le temps est très intéressant. L'Île du docteur Moreau me fait envie, je suis curieuse de voir comment l'auteur, comme à son habitude, mêle science et fiction.

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    1. Ton commentaire me rassure un peu, "La guerre des mondes" faisant partie de ces classiques que tout le monde semble avoir aimé ! Il fait dire que dans mon souvenir, "La guerre..." est aux antipodes de cette "Ile du docteur Moreau" : ennuyeux au possible !! Je te conseille donc de tenter l'aventure avec ce titre, d'autant plus qu'il se lit rapidement..

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  10. Bonjour Ingannmic, toujours rien lu de Wells mais j'ai vu plusieurs adaptations filmées dont L'île du Docteur Moreau. Bonne journée.

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    1. Bonsoir Dasola,
      Maintenant que j'ai lu ce titre, je suis bien curieuse d'en voir une adaptation, je vais creuser ça..

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  11. Je ne l'ai toujours pas lu... comme tu l'écris, on a l'impression de les connaître déjà, ces récits. Il faudrait tout de même, pour l'original ( comme pour Frankenstein dans mon cas ).

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    1. J'ai justement "Frankestein" sur ma PAL.. si une LC te dit..

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    2. Bonne idée, ce serait motivant. ( mais je crois que c'est raté pour ce mois anglais )

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    3. Oui, je pensais plutôt à caler ça d'ici septembre, par exemple ?

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    4. D'accord, ce serait possible. ( je suis en déplacement, ce qui explique mes réponses tardives ). Une préférence pour la date ?

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    5. Peu importe pour moi, à part le 15/09, date de la LC en hommage à Goran. Donc ça peut être le 21, 24, 27 ou 30 (je publie tous les 3 jours en général :).

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    6. Peu importe pour moi, à part le 15/09, date de la LC en hommage à Goran. Donc ça peut être le 21, 24, 27 ou 30 (je publie tous les 3 jours en général :).

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    7. J'espère aussi participer au rendez-vous pour Goran. Alors je note le 21 septembre pour notre LC. Je suis désolée, je viens de voir que j'ai complètement oublié cette LC d'aujourd'hui, pour Nemesis de P.Roth.

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  12. Je ne sais pas encore si je lirai ou relirai (?) cet auteur. Pour l'instant, ça ne m'attire pas plus que ça.

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    1. Je suis contente de l'avoir lu, cela m'évite de rester sur la note négative qu'avait suscitée "La guerre...", mais ce n'est pas un titre que je relirai...

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  13. Merci pour cette chronique, j'ai bien envie de le lire :)
    Bonne journée !

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    1. Mais avec plaisir, j'espère que tu seras toi aussi embarquée dans cette étrange aventure...

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  14. Eh bien voilà, celui-ci, je n'arrive pas à savoir avec certitude si je l'ai lu ou non. Mais je suis davantage tentée par La guerre des mondes même si tu t'y es ennuyée car j'ai vu d'autres retours plus enthousiastes, du coup je suis très intriguée. Dans quel camp me trouverai-je ? ^^

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  15. Je l'ai lu et je me rappelle des grandes lignes... comme le rappelle ta conclusion, un livre qui ne donne pas particulièrement envie...

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    1. Oh mais je me rends compte que j'ai dû mal m'exprimer, parce que j'ai apprécié cette lecture. Ma conclusion évoque l'éthique -ou plutôt la non éthique- du docteur Moreau, qui ne convainc pas, et non la qualité du roman...

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