LE RECAPITULATIF DE L'ACTIVITE

"Hana" - Alena Mornštajnová

"Ils m’ont conseillé d’oublier parce qu’ils ne voulaient pas entendre ce que je pourrais raconter."

C’est à partir de ceux de l’année 1954 que Mira, la narratrice, entame le récit de ses souvenirs. Elle a neuf ans, et vit dans la petite ville tchécoslovaque de Valašské Meziříčí. Cette année sera funeste, mais on ne le comprend pas d’emblée. Elle commence par nous expliquer que sa désobéissance lui a alors sauvé la vie, revient sur l’épisode auquel elle se réfère ainsi, une bêtise d’enfant pour laquelle sa mère la punit. Cela se conclut par la mort de ses parents et de ses frère et sœur, emportés par le typhus. 

Mira est recueillie par sa tante Hana, seule à avoir survécu à la fièvre typhoïde fatale au reste de la famille.

Hana a toujours été un mystère. La fillette, que sa tante effraie, la compare à un grand papillon de nuit. Toujours vêtue de noir, mutique, elle n’a jamais manifesté le moindre intérêt pour ses proches, ni même d’ailleurs pour quoi que ce soit. Lors des réunions de famille, elle restait silencieuse, le regard fixe, se contentant d’exprimer envers son beau-frère une hostilité sourde mais manifeste. La mère de Mira a en revanche toujours montré pour sa sœur une indéfectible affection.

Une étrange cohabitation s’installe entre l’enfant et sa tante, Mira opposant à l’inertie d’Hana son énergie et ses bavardages.

Le récit remonte ensuite aux années 1930, nous donne à voir une Hana jeune, séduisante et pleine de vie. Elle et sa jeune sœur Rosa sont élevées par leur mère Elsa, veuve, dont la force de caractère lui a permis de surmonter les difficultés matérielles. Alors que ses filles grandissent, qu’Hana découvre l’amour et que Rosa s’affirme malgré l’excessive fragilité que sa mère lui prête, les manifestations croissantes d’antisémitisme amènent à envisager un exil en Angleterre.

La troisième et dernière partie balaie les années 1942 à 1963 du point de vue d’Hana.

Si l’on pressent assez vite que le traumatisme de cette dernière est en lien avec la guerre, et que son mutisme fait écho à la chape de silence que la collectivité a posé sur l’Holocauste, ce n’est que peu à peu que l’on comprend l’ampleur du traumatisme qui hante Hana, et l’abime de culpabilité qui lui interdit de vivre. Quand l’Histoire s’en mêle, certains choix individuels a priori anodins deviennent les catalyseurs d’événements aux conséquences insupportables.

Alena Mornštajnová nous offre là un très beau roman, dont la construction narrative, habile, entretient une progression dramatique qui le rend d’autant plus poignant. Les thèmes du deuil et de la reconstruction, de la responsabilité -mais aussi de l’amour- qu’impliquent les liens familiaux, sont abordés de manière subtile, la voix de Mira compensant la dimension tragique du récit par son énergie et sa sincérité.

Les avis de Fabienne, Eva et Claudialucia.

Commentaires

  1. Voici un sujet qui me semble dur et bien traité. Mais je ne crois pas connaître cet éditeur... (et j'ai à nouveau du mal à déposer des commentaires ici, dommage, c'était bien quand ça partait tout seul...).

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    1. C'est une maison d'éditions consacrée aux littératures européennes, je crois que c'est Keisha qui me l'a fait connaître. L'un de mes coups de cœur 2023, La guitare de palissandre, est paru chez eux.
      Et comment se traduit la difficulté à poster des commentaires ?

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    2. Je me souviens l'avoir vu l'année dernière sur les blogs. Je pense déjà lire La guitare de palissandre chez ce même éditeur... ensuite, pourquoi pas celui-là ?

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    3. Je te le recommande chaudement !

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    4. Eh bien comme avant : je clique sur "Publier" et s'affiche un message qui me dit : échec de la publication, veuillez réessayer plus tard. J'ai changé de navigateur et ça a marché mais parfois, ça ne suffit pas et il faut recliquer de temps en temps, 5 ou 6 fois en général pour qu'il parte enfin, sans avoir rien fait de plus.

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    5. Ah, ça fait longtemps que ça ne m'est pas arrivé... je me demande si de passer sur le format utilisé par Nathalie aide à résoudre le problème...

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  2. Oh mais oui, cet éditeur /trice je ne sais pas absolument excellente! Après, faut voir en bibli...

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    1. Ton commentaire s'était mis dans les spams... j'avais trouvé La guitare de palissandre à la médiathèque, il faut voir pour le reste en effet..

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  3. J'avais aimé "la guitare de palissandre" mais je ne sais pas si une maison d'édition peut être un gage de qualité .

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    1. Je pense que dans toute maison d'édition, il y a forcément une hétérogénéité au niveau de la qualité. Mais je me dis que quand une maison d'édition est contrainte dans le nombre de titres qu'elle peut publier, le choix est plus réfléchi, ce qui augmente les chances de tomber sur un titre de qualité..

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  4. Étrangement, il n'est pas dans ma liste de livres à lire alors que j'avais vu les billets de la LC Eva/Fabienne/Claudialucia, tous très positifs. Je corrige cet oubli tout de suite, ayant très envie d'explorer la littérature tchèque contemporaine.

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    1. Je suis tombée sur un exemplaire d'occasion en bouquinerie, c'est ce qui me l'a remis en mémoire... l'inconvénient de ces petites maisons d'édition, c'est que les titres ne sont pas forcément présents en médiathèque, et qu'on ne peut pas compter sur les sorties poche. Mais il vaut vraiment d'être noté !

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  5. j'adore cette maison d'édition, j'en ai plusieurs, mais ils publient trop vite - je le note (j'espère le trouver à la BM)

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    1. J'espère aussi, mais tu devrais sinon le trouver à la médiathèque de Nantes...

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    2. du coup je l'ai trouvé, mais pourquoi ce billet réapparaît sur mon feed ? comme si tu le republiais aujourd'hui, en fait je l'ai déniché en seconde main en anglais à ma bouquinerie

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    3. Oui, c'est étrange, je n'ai fait aucune manip qui pourrait expliquer ça... et j'attends ton avis avec impatience !

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  6. Ma bibliothèque l'a ; ce qui me laisse toute latitude pour essayer. Le thème m'intéresse.

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    1. Voilà qui contredit ma réponse à Sacha (et c'est vrai que j'avais pu emprunter La guitare de palissandre à la médiathèque)... je pense qu'il te plaira !

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  7. J'ai eu envie de lire ce livre, il y a quelques mois, et tous les avis sont positifs mais... en ce moment, ça ne me dit rien. Peut-être plus tard.

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    1. Il faut en effet faire selon ses envies... mais retiens-le pour plus tard, oui !

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  8. miriam panigel12 mars 2024 à 15:09

    Dommage que le mois de la Littérature de l'Est n'existe plus. Cela aurait été une bonne occasion de le lire. Je le note en pense-bête

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    1. J'avais prévu de le lire dans le cadre de l'activité organisée par Patrice et Eva, et j'ai maintenu, mais cela a été ma seule lecture est européenne sur mars, alors que j'avais pris l'habitude d'y consacrer tout le mois.. mais j'ai encore quelques titres sur mes étagères, que je lirai au fil de l'eau...

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  9. Moi non plus, je ne connaissais pas cette maison d'édition, ce qui fait déjà une découverte, grâce à ton billet. En outre, ce que tu laisses deviner du roman est très tentant. Je vais de ce pas fouiller un peu plus parmi les avis des uns et des autres avant de voir sir je peux tenter pour me faire mon propre avis.

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    1. Tous les avis vers lesquels renvoient les liens en fin de billet sont positifs, en tous cas ! Et sinon, pour découvrir cette maison d'édition, il y a le très beau "La guitare de palissandre", que j'ai préféré à ce titre, qui pourtant m'a conquise...

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  10. La couverture m'évoquait un éditeur et les commentaires m'ont rappelé La guitare de Palissandre que je voulais lire. Pour ce titre-ci, les thèmes me parlent moins mais je ne doute pas de la qualité du roman.

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    1. Dans ce cas, reste en effet sur ton envie de lire La guitare de palissandre, qui est très très très bien....

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  11. Je suis très contente que tu aies pu mettre la main sur ce roman et que tu l’aies apprécié ! L’autrice a beaucoup de succès en Tchéquie - elle traite de différents sujets, y compris contemporains. En Allemagne, ses livres sont édités aussitôt, mais je crains qu’en France on se limitera à Hana.
    Avec Patrice, nous avons rencontré la très sympathique éditrice des éditions Bleu et Jaune lors d’un salon littéraire et on s’est fait plaisir en achetant plusieurs livres, notamment celui d’Artem Chapeye. Une belle ligne éditoriale !

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    1. Quelle chance d'avoir pu échanger avec l'éditeur, je suivrai avec beaucoup d'intérêt vos avis sur ces lectures...

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  12. Un beau roman ! Je l'avais lu pendant le mois de lecture des Pays de l'Est que je regrette aussi..

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    1. Le mois thématique manque, je crois, à beaucoup de blogueuses, il suffit de voir les lectures est européennes qui ont fleuri, de-ci de-là, sur le mois de mars.. J'avais l'intention d'en lire plusieurs, mais je me suis laissée embarquer par la thématique du travail et d'autres LC. Mais j'y reviendrai sans doute dans l'année...

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