LE RECAPITULATIF DE L'ACTIVITE

"Une ardente patience" - Antonio Skármeta

"Au Chili, tout le monde est poète. Tu seras plus original en restant facteur."

Fin des années 1960. Envoyé dans la bourgade de bord de mer où vit Pablo Neruda pour l’y interviewer, le narrateur, rédacteur culturel dans un journal de "cinquième catégorie", se voit opposer un refus courtois mais ferme. Echouant par ailleurs à concrétiser des velléités littéraires vaincues par la procrastination, il rôde autour de la maison du poète, et fait la connaissance des protagonistes dont il nous livre l’histoire qui suit.

Mario Jimenez, fils de pêcheur que les corvées de la pêche rebutent, préfère passer son temps en rêveries et à aller au cinéma, jusqu’à ce que son père lui impose de trouver un travail. C’est ainsi qu’il devient le facteur de l’unique résident de l’Ile Noire, Pablo Neruda, qui reçoit quotidiennement des kilos de courriers.

Grand admirateur du poète, le jeune homme s’investit dans sa mission avec enthousiasme, et se pique d’écrire lui aussi des vers, certain qu’il pourra ainsi conquérir le cœur de la belle Beatriz, dont il est éperdument amoureux, mais que sa timidité l’empêche d’aborder. Neruda, dont il sollicite les conseils, se prend peu à peu d’affection pour ce jeune homme sincère et ingénu, avec lequel il entretient bientôt de longues conversations, des échanges rendus réjouissants par la spontanéité de l’un et la bienveillance amusée de l’autre. 

Pendant que Mario apprivoise l’art de la métaphore pour séduire Beatriz, contrecarré par sa potentielle future belle-mère qui se méfie comme de la peste de ces hommes qui attaquant avec la parole, parce "qu’il n’y a pas pire drogue que le boniment", l’Histoire est en marche. Pablo Neruda renonce, en faveur de Salvador Allende, à être candidat à la présidence de la République, et obtient le Prix Nobel, occasion d’une fête orgiaque qu’organise Mario à San Antonio. Puis la tragédie rattrape le Chili…

Quel bon moment j’ai passé avec ce roman, certes court mais riche d’une énergie et d’un humour roboratifs ! L’auteur mêle crudité et sensualité, gouaille et poésie en un parfait équilibre, tout en introduisant progressivement, avec beaucoup de subtilité, une dimension mélancolique qui lui confère sa profondeur.

"Mais les trains qui mènent au paradis sont toujours des omnibus et ils restent en souffrance dans des gares moites et suffocantes."



Commentaires

je lis je blogue a dit…
ton billet donne très envie de lire ce livre
Sandrine a dit…
Lu aussi avec plaisir. Il existe un film avec Noiret parfait en poète bourru et tendre.
Ingannmic, a dit…
Tant mieux, car c'est un excellent roman, réjouissant malgré son sombre contexte !
Ingannmic, a dit…
Merci, je ne savais pas pour le film. J'ai ajouté un lien vers ton billet, bien plus complet que le mien.
Athalie a dit…
Comme toi, j'avais adoré ce titre, réjouissant, drôle et poétique avec légèreté mélancolique. Le personnage du facteur est génial (par contre, je m'étais mortellement ennuyée en voyant le film ...)
Aifelle a dit…
J'ai vu le film, que j'avais aimé, mais je n'ai pas lu le roman. Il n'est jamais trop tard pour bien faire ..
Ingannmic, a dit…
J'ai rajouté le lien vers ton billet également, je ne me souvenais plus que tu l'avais lu.. tu le qualifies de "tendre", et je te rejoins complètement, la relation entre le facteur et le poète est vraiment touchante. Et puis on rit aussi, oui, Mario est d'une sincérité désarmante, sa belle-mère une fantastique mégère... je vois en revanche que tu n'as pas été convaincue par le film, contrairement à Sandrine, j'essaierai de me faire ma propre idée..
Ingannmic, a dit…
Il a tout pour plaire, en tous cas : il est bref sans être expéditif, et trace sa route entre Histoire et quotidien avec beaucoup d'intelligence.
keisha a dit…
Hé bien quel bel avis, figure toi que j'ai noté déjà ce roman.
Sacha a dit…
Je me disais bien en lisant ton billet que ça me rappelait fortement quelque chose alors que ni l'auteur ni le titre ne m'étaient familiers. C'est donc le film dont je me souviens en fait, mais il m'a laissé une impression de mélancolie, loin du roman qui m'intéresse du coup beaucoup pour son humour.
Athalie a dit…
Ha oui, la belle mère ... J'avais oublié ... Mais c'est une lecture ancienne et pour le film, je ne suis pas très fiable puisque je ne me souviens que de m'être endormie devant ^-^
Ingannmic, a dit…
Il a été proposé à deux reprises lors du mois latino, et je le pensais récent mais non, il a été publié en 1985 (c'est l'allusion au film qui m'a interpelée..). Et tu peux le retenir, je suis convaincue qu'il te plaira !
Ingannmic, a dit…
Oui c'est sans doute ce que j'en garderai avec le recul, le ton est réjouissant et on rit pas mal, ça ne se refuse pas !
Ingannmic, a dit…
Ce qui n'est tout de même pas très bon signe (pour le film..) !
nathalie a dit…
Je suis aussi dans l'équipe "a vu le film". Tout ce dont je me souviens, c'est que je l'ai vu au cinéma avec ma mère à sa sortie, je crois que ça nous avait plu, mais pas d'autres souvenirs... Je note le titre, ce sera une façon d'approcher Neruda même si j'ai déjà lu et chroniqué sa poésie.
Fanja a dit…
Ah quel plaisir de lecture ce livre ! Oui, "court mais riche d’une énergie et d’un humour roboratifs", c'est très exactement ça. Tu me donnes envie de lire un autre roman de cet auteur !
Ingannmic, a dit…
Je ne sais pas si le personnage de Neruda est fidèle au poète mais il est en tous cas fort sympathique... je ne l'ai personnellement jamais lu, une lacune sans doute.
Ingannmic, a dit…
Je dois au passage te remercier, car il avait rejoint ma pile suite au billet que tu avais proposé pour le Mois latino. Je me suis penchée sur le reste de sa bibliographie, et serais tentée par "No", je le retiens pour plus tard..
Kathel a dit…
Mince, je serais presque déçue de l'avoir déjà lu, tant ton billet donne envie. En l'ouvrant, j'ai tout de suite remarqué la citation finale qui est superbe !
Ingannmic, a dit…
Ah oui, j'adore cette phrase ! Je suis étonnée de constater que vous êtes si nombreuses à l'avoir lu, et d'être jusqu'à présent passée à côté..
Géraldine a dit…
l'ensemble semble délicieux. J'irais bien faire connaissance de ce Mario.
Géraldine a dit…
En fait, je viens même de proposer ce titre pour le prochain club de lecture de ma médiathèque, car il y a de bons arguments pour plaire "à ces dames".
Ingannmic, a dit…
Je suis sûre que tu seras conquise !
Ingannmic, a dit…
Quelle bonne idée, je suis ravie d'avoir contribué, à ma modeste échelle, à diffuser ce titre. Et que de plaisir en perspective pour ses futures lectrices !