LE RECAPITULATIF DE L'ACTIVITE

"Imelda" - John Herdman

"Est-ce que je prends la pose ? Est-ce que je romance ? Sans aucun doute. Que peut faire d’autre un pauvre fou, enfermé loin du monde depuis sa jeunesse, condamné à s’analyser en vain et pour rien, à perpétuellement se condamner ?"

Alors qu’elle va devenir mère, une certaine Janice Moodie, adoptée à l’âge de deux mois, cherche à en apprendre davantage sur ses parents biologiques. Ayant contacté l’un des rares membres encore vivants de sa famille, elle entre en possession par son intermédiaire de deux récits censés l’éclairer sur ses origines.

Le premier est écrit par son Franck Agnew, frère cadet de son père, qui depuis trente ans est interné en hôpital psychiatrique. Il y revient sur ses jeunes années, passées dans le vaste domaine familial des West Highlands, décor d’un drame dont la genèse coïncide avec l’apparition d’Imelda. C’est Sir Robert Affleck qui introduit la fillette, qui est sa pupille, chez les Agnew. A la demande de sa sœur, la maîtresse de maison, il vient y tenir le rôle de régisseur que son pasteur de beau-frère se révèle incapable d’endosser. Il est également accompagné d’un sombre personnage, Johnny Restorick, sorte d’homme à tout faire au physique repoussant, dont émane une aura de mystère et de fourberie.

Une rivalité s’instaure très vite entre Franck et son frère Hubert autour d’Imelda, créature au teint diaphane, à la fois délicate et comme habitée d’une force discrète mais sauvage. Si l’on en croit le premier, la compétition est à son avantage. Il ne tarit en effet pas d’éloge sur sa propre personne, se décrivant comme un éphèbe vigoureux et doté d’exceptionnelles qualités d’esprit, en tous points opposé à son lourdaud d’aîné, un rouquin trapu affublé d’une bêtise phénoménale et d’irritants problèmes intestinaux à l’origine de formidables flatulences qui s’expriment aux moments les moins opportuns. 

En parallèle, Franck entretient avec l’obscur Restorick des liens ambivalents, formant une sorte d’amitié silencieuse nuancée de méfiance autour notamment de leur passion commune pour le monde végétal, le garçon s’abreuvant des vastes connaissances de l’homme en la matière. Il tirera d’ailleurs par la suite prétexte d’un travail de recherche sur les champignons pour mener une vie oisive au sein du domaine familial pendant qu’Hubert le quittera pour faire -malgré sa prétendue médiocrité intellectuelle- de brillantes études.

Succédant aux mémoires de Franck, le récit de Sir Robert Affleck y apporte un éclairage nouveau, tantôt le corroborant, tantôt le contredisant. Il confirme ainsi les doutes du lecteur quant à la fiabilité du premier, que son emphase notamment rend suspect, sans pour autant rétablir une vérité qui n’en devient que plus incertaine et inatteignable. Il consolide en revanche la dimension trouble et malsaine de cette réalité qui nous échappe, à l’instar du personnage d’Imelda qui, uniquement défini par le regard, biaisé par leurs désirs, voire leurs perversions, des autres, est réduit à une silhouette vague, évanescente.

S’appuyant sur les codes du roman gothique -intrigue en huis-clos, atmosphère croupissante et mortifère, protagonistes figés dans un univers en déréliction…- John Herdman nous livre avec Imelda un texte vénéneux, et subtilement envoûtant.

Commentaires

  1. J'aime beaucoup les romans gothiques et c'est la saison idéale. Le couverture est jolie en plus

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  2. Vénéneux ? (oui, déjà il y a un champignon ^_^)

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  3. Jamais entendu parler de ce roman mais en général j'aime bien les intrigues avec des narrateurs peu fiables.

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  4. intrigant! Merci pour cette idée!

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  5. une fois de plus, je suis tentée ! cette fois-ci, c'est le côté gothique qui m'attire.

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  6. Pourquoi pas ? Tu réussis à nous intriguer !

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  7. encore un genre littéraire auquel je ne me suis pas encore frottée "gothique et vénéneux" ce n'est pas vraiment attirant

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