"Ladies in blues" - Michel Quint
"Aux premières notes qu’il en a tirées, (…) j’ai compris que ce type avait notre destin dans ses poches".
La première tire son titre de l’établissement que tient le narrateur. Le Yellow Dog est une ancienne petite ferme de la campagne lilloise reconvertie en club de jazz. Un quintet y joue pour des clients qui dinent ou boivent un verre sous des lumières tamisées. Sam -ainsi surnommé par ses acolytes en référence au barman d’un vieux western- y est à la fois associé et serveur. C’est un homme posé, visiblement sans passion, que l’on dit "estropié du sentiment". Ce que tout le monde ignore, y compris la principale intéressée -à moins qu’elle ne le cache bien-, c’est que Sam aime la chanteuse du Yellow Cab. Wanda sent le tabac froid et elle n’est plus de la première jeunesse mais elle est douloureusement belle, et surtout dotée d’un sacré caractère. Au Yellow Dog, ça va de soi, c’est elle qui commande. Aussi, lorsque débarque un beau jour un certain Wim, et qu’elle décide qu’il doit rester, Sam comme les musiciens s’inclinent. L’homme affiche une quarantaine à la fois miteuse et charismatique, mais surtout il les ensorcelle avec son cornet.
Wanda et Wim, c’est en réalité une vieille histoire qui s’est mal terminée… la présence de ce nouveau venu, désinvolte et flambeur, électrise l’ambiance mais est aussi l’occasion de vrais moments de grâce. Du moins pour un temps…
J’ai aimé que l’auteur place son intrigue dans un décor auquel on ne s’attend pas, créant ainsi une sensation de contrepied. Il transpose en effet les codes du roman (et du cinéma) noir des années 50 -avec ses femmes fatales, ses voyous ténébreux et ses atmosphères enfumées- dans un contexte rural et contemporain où on ne les attend pas. Le résultat est un texte court mais efficace, dans lequel l’immersion est immédiate, et l’intérêt soutenu jusqu’à une conclusion délicieusement cruelle…
J’ai été moins convaincue par le second texte.
"Singin’ the lady blue" commence sous les auspices d’un orage d’été qui compromet le déroulement d’un festival se tenant dans le sud-est de la France. L’orchestre de jazz qui devait se produire en plein air se replie dans la villa d’une des organisatrices, où l’on improvise un pique-nique d’intérieur autour de tartines de tapenade, de tomates-mozza, de jambon cru et de quelques bouteilles de blanc. Parmi les convives, une femme mélancolique suscite de discrètes interrogations. Il s’agit d’Eva, que la perte d’un proche, un an auparavant, a traumatisée. Rongée par la culpabilité, cette célèbre violoniste a depuis été incapable de toucher son instrument.
Dommage pour la seconde nouvelle mais la seconde semble largement compenser. Dans les deux cas, il semble y avoir une note d'originalité. C'est ta combien unième participation au mois des nouvelles ? Merci pour ton enthousiasme.
RépondreSupprimerDommage pour le second texte. En tous les cas le premier est bien tentant et ce serait l'occasion pour moi de faire connaissance avec cet auteur que je n'ai jamais lu.
RépondreSupprimerEn fait je réfléchis que je te dis des bêtises j'ai déjà lu "Effroyables jardins" !
RépondreSupprimerJe ne lis que peu de recueil de nouvelles mais la couverture m'a attiré et les histoires contées me paraissent hyper intéressantes.
RépondreSupprimer