"Je suis l’hiver" - Ricardo Romero
"S’il avait le choix, il serait quelqu’un qui ne rêve ni ne dort jamais."
Fraichement diplômé de l’école de police, l’adjudant Pampa Asiain a été muté dans le village de Monge, qui compte deux-cents habitants, une route, un bar, et de nombreuses maisons inhabitées. C’est en revanche une bourgade sans enfants, sans église, et sans cimetière. Il y tient sa permanence en compagnie d'un unique collègue, Andrés Parra, le supérieur censé compléter leur équipe n’étant jamais venu. Une grande partie de leurs journées s’écoule à regarder par la fenêtre du poste en buvant du maté, Andrés laissant le transistor allumé en permanence pour combler le vide et l’isolement.
Pampa est quant à lui un jeune homme solitaire, laconique, qui passe son temps libre à jouer de la guitare dans un silo abandonné. Comme absent au monde, il a souvent du mal à saisir son propre état d’esprit, à savoir s’il est content ou triste, enthousiaste ou fâché. Il n’a jamais rêvé d’être policier, n’a d’ailleurs jamais rêvé d’être quoi que ce soit. Des souvenirs d’enfance marqués par l’image d’un père devenu alcoolique et brutal suite à l’amputation d’une jambe surgissent régulièrement dans son esprit, sans que la mention d’un traumatisme soit évoquée, Pampa semblant se mettre naturellement à distance de ces réminiscences. Se méfiant comme de la peste de l’imagination et de son emprise sur les êtres, il tente d’en anéantir toute manifestation. C’est depuis toujours un observateur au regard froid, presque désincarné : enfant, il passait ainsi de longues heures à regarder sa mère dormir, après s’être discrètement glissé dans sa chambre.
Et c’est le même genre d’attitude qu’il adopte lorsqu’il trouve, au bord du lac gelé dans lequel il vient de se baigner, le corps d’une jeune fille pendu à un arbre, portant des traces de coups sur le visage. Plutôt que de donner l’alerte, Asiain s’installe pour contempler le cadavre, incertain quant à ce qu’il attend ainsi…
A l’instar de son personnage atypique, "Je suis l’hiver" est plombé d’une mélancolie profonde mais indécise, comme si ce qu’on y vivait "n’était que l’écho d’un monde qui avait pris fin". C’est un roman énigmatique mais envoutant, dont le rythme et l’atmosphère sont en parfaite osmose avec un décor figé dans le froid et la neige, où tout semble se parer d’une dimension irréelle.
Je ne sais pas trop. Je crois que j'ai mon compte de bizarreries pour l'instant.
RépondreSupprimerJe comprends ! C'est un titre très étrange, et les avis lus à son sujet laissent penser que ça passe ou ça casse.. j'ai bien aimé, l'atmosphère est bien campée, et c'est un texte qui déstabilise et intrigue...
Supprimerles nouvelles sont assez plombantes comme ça !
RépondreSupprimerDisons qu'ici, le héros affiche une sorte d'impassibilité qui compense la noirceur..
SupprimerÉventuellement, je tenterais bien cette lecture si ma médiathèque le possède. Je n'ai rien contre un peu de bizarrerie, il faut juste que je choisisse le moment idéal.
RépondreSupprimerIl est sorti en poche, tu le trouveras donc peut-être à la médiathèque. J'ai noté de mon côté le dernier titre de l'auteur dont Jean-Marc entre autres dit beaucoup de bien (https://actudunoir.wordpress.com/2022/09/13/les-chiens-de-la-pluie/), et qui semble aussi singulier que celui-là...
SupprimerTrop original pour moi. Décidément, j'ai du mal à trouver quelque chose à mon goût dans la littérature sud-américaine.
RépondreSupprimerJ'ai vu que tu avais peut-être trouvé ton bonheur chez Delphine Olympe, avec Laura Alcoba !
SupprimerUn bouquin qui m’aurait certainement intéressé à une époque mais là, je ne sais pas trop, d’ici quelques mois peut-être ?
RépondreSupprimerMais oui, par exemple lors du prochain hiver, histoire d'être bien dans l'ambiance...
SupprimerEn effet il est en poche.J’avais bien aimé. Oui j’allais te suggérer Les chiens de la pluie,que j’avais repéré sur le blog de L’Actu de noir.
RépondreSupprimerC'est cette sortie poche qui me l'a fait ajouter, au dernier moment, sur la liste de mes lectures de cette édition du Mois latino. Je ne le regrette pas...
SupprimerVraiment curieux. On verra si je le croise en librairie.
RépondreSupprimerNathalie
Il vient de sortir en poche, tu devrais le trouver facilement, au rayon polar donc !
SupprimerHmmm d'habitude, étrange et original sont des mots qui m'attirent et j'aime assez ces livres qui ne sont pas ce qu'ils paraissent être au premier abord, mais cette mélancolie profonde me freine un peu...
RépondreSupprimerMoui.. toi qui apprécie surtout, si je ne m'abuse, l'originalité associée à l'humour, tu risques de ne pas y trouver ton compte.
SupprimerD'abord je suis très heureux que les éditions Asphalte aient décidé de démarrer une collection en format poche ! car c'est un éditeur avec un catalogue très riche et de qualité ! Ensuite ce roman me fait de l'oeil au point que je l'ai acheté ( avec " jusqu'à la bête" sortie en même temps ) . Il me tarde de le lire d'autant que ta chronique mets bien en appétit !! :)
RépondreSupprimerJe te rejoins sur cette maison d'édition, et ses propositions souvent originales. J'ai aussi repéré "Jusqu'à la bête". Je suis curieuse d'avoir ton avis sur les deux.
SupprimerJ'aime le titre car chez-moi, je suis l'hiver en ce moment! On croule sous la neige! ;)
RépondreSupprimerC'est le moment de le lire alors, tu serais vraiment dans l'ambiance !
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