"Les tentacules" - Rita Indiana
"Dans les Caraïbes, nous vivons dans les zones obscures du cerveau planétaire, comme sous l’emprise du LSD."
Il nous embarque d’abord dans une ambiance futuriste. Nous sommes en 2027. Depuis le passage, trois ans auparavant, d’un tsunami dévastateur, la République Dominicaine est divisée en deux. Une moitié de l’île est déclarée en quarantaine, pendant que dans l’autre, des dispositifs de sécurité automatisés tuent et désintègrent tout intrus identifié comme étant porteur d’un virus sur lequel nous n’apprendrons rien de plus. Les smartphones sont devenus obsolètes : une puce implantée dans le poignet permet, d’une simple pression, de naviguer sur internet.
Acilde Figueroa vit dans la bonne partie de l’île. Elle s’y prostituait dans un parc public auprès de sexagénaires excités par son physique de jeune garçon jusqu’à ce qu’Esther Escudero, une célèbre prêtresse vaudou proche du président, la prenne sous son aile. Acilde a été convaincue par un de ses amis de voler une sorte d’anémone qu’Esther abrite dans une jarre et par l’intermédiaire de laquelle elle rend hommage à la déesse de la mer au cours de mystérieuses cérémonies. L’animal marin vaudrait une fortune, et sa vente permettrait à Acilde de se procurer le fameux Rainbow Bright, un produit permettant de changer de sexe sans intervention chirurgicale.
Un bond en arrière nous ramène dans les années 2000, où les riches mécènes Giorgio Menicucci et Linda Goldman, biologiste obsédée par l’idée de la dévastation environnementale, organisent une résidence d’artistes en vue de créer un sanctuaire marin. Y participe entre autres Argenis, peintre raté et dopé à la cocaïne, qui durant son séjour chez le couple vit deux réalités simultanées qui parfois se superposent, celle d’un présent auquel il a de plus en plus de mal à se raccrocher, et une qui le transporte vers un passé où il a maille à partir avec des boucaniers.
Ça peut paraître un peu foutraque, et on se demande au départ quel est le lien entre ces épisodes hétéroclites et enrichis de digressions a priori incongrues. De nombreuses thématiques - existentielles, sociales, écologiques- émergent spontanément de l’intrigue par ailleurs baignée d’une ambiance étrange et hybride, où l’anticipation se mêle au surnaturel des rites vaudous et de leurs divinités afro-antillaises, et où l’on prête à une nature déifiée des intentions vengeresses.
Je l'aurais bien lu sans ces divinités vaudoues, etc. Dommage.
RépondreSupprimerElles apparaissent certes un peu, mais ne sont pas au centre du récit. Moi qui n'aime pas spécialement non plus l'ésotérisme, cela ne m'a pas gênée...
Supprimerc'est ce genre de livres qui m'a fait dire que la littérature de ces pays n'était pas pour moi : je ne comprends pas leur rapport au surnaturel
RépondreSupprimerC'est vrai que la littérature sud-américaine a une propension au surnaturel (le fameux "réalisme magique" !) mais il est finalement absent de la plupart des titres que j'ai lus pour cette édition. Là, j'ai aimé les intrusions du fantastique, qui participe à l'originalité de l'atmosphère.
SupprimerIl me semble reconnaître une couverture de l'éditeur "Rue de l’Échiquier", c'est ça ? Il faut que je me penche un peu plus sur ce catalogue qui me semble riche en pépites.
RépondreSupprimerOui, tu as bien vu. C'est en effet une maison d'édition très intéressante par l'originalité de ses propositions. Jusqu'à ce titre, je n'étais pas parvenue à trouver de roman dominicain pour le mois latino..
SupprimerUne découverte étonnante de plus grâce à ce mois latino ! L'incursion du fantastique ne m'attire pas vraiment, mais je comprends ton plaisir de lecture face à cette créativité et cette maîtrise !
RépondreSupprimerJe suis en effet ravie de cette lecture atypique... et il y en a d'autres à venir !
SupprimerPS: J'ai vu chez Doudoumatous que tu pouvais inscrire des abonnés manuellement. Je veux bien en être :-D Merci d'avance !
RépondreSupprimerOui, avec plaisir, j'utilise l'adresse desromansmaispasseulement[at]tutanota.com ?
SupprimerOui, exactement ! Merci d'avance.
SupprimerC'est fait !
SupprimerJe n'embarquerai pas pour ce voyage-là ; trop d'éléments me perdraient je crois.
RépondreSupprimerC'est surtout déstabilisant, parce qu'au départ on ne voit pas le lien entre les différentes parties, mais le récit n'est pas difficile à suivre, et à la fin, tout s'emboîte, c'est très bien fait !
SupprimerBravo pour cette découverte originale. Cela semble un peu foutraque a priori mais si tu dis que c'est finalement très maîtrisé, je veux bien te croire
RépondreSupprimerOui, ce n'est pas un titre difficile à lire, grâce au talent de l'auteure qui contrôle parfaitement la structure d'ensemble, mais joue à nous en cacher des pans, jusqu'à l'explication finale.. de ce point de vue, c'est un roman très réussi.
SupprimerMoi aussi j'ai eu beaucoup de mal à commenter ce livre ! On ne sait pas trop comment le prendre. Oui, de l'admiration pour cet exercice de style ( Quelle écrivaine !) mais non, je n'ai pas vraiment aimé ! Trop de distance par rapport aux personnages, en fait leur histoire me laisse froide. Je me suis intéressée à la mythologie même si c'est tout de même secondaire dans le roman.
RépondreSupprimerJ'ai trouvé cette lecture très ludique, et vraiment surprenante. Ca m'a suffit pour aimer !
Supprimerintéressant ta chronique et lire les commentaires des autres lecteurs, tu as été emballée tant mieux, mais je t'avoue que l'histoire ne m'intéresse pas du tout, même si je suis prête parfois à m'embarquer dans de drôles d'histoires. J'ai besoin pour reprendre la lecture d'histoires plus terre à terre. Mais c'est bon de te voir si enchantée après une lecture !
RépondreSupprimerAh oui, je suis friande de ce genre d'ovni, tant que cela reste lisible, et c'est le cas ici...
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