LE RECAPITULATIF DE L'ACTIVITE

"Le chien jaune" - Georges Simenon

"Maigret était placide. Il était même, énorme sur sa petite chaise, une statue de la placidité."

La petite ville fortifiée de Concarneau, habituellement tranquille, est soudainement plongée dans une atmosphère de drame suite au coup de feu tiré sur un citoyen respectable et sans histoire alors qu’il rentrait chez lui après une soirée passée avec des amis au Bar de l’Amiral. Et ce n’est que le début d’une série d’événements aussi inquiétants qu’inexplicables qui plongent bientôt la cité dans l’effroi : on retrouve du poison dans une des bouteilles de Pernod destinée aux clients du bar susnommé, puis l’un des compères de la victime de l’agression disparaît, laissant derrière lui une voiture aux sièges ensanglantés.

L’enquête est confiée au Commissaire Maigret, qui, je ne sais plus pour quelle raison, est détaché dans la région. Il y est accompagné de Leroy, jeune inspecteur frais émoulu de l’école de police, qui, fort consciencieux, s’attache à recueillir témoignages et indices techniques. Il est un peu gêné par l’inertie de son patron, mais, respectueux de la hiérarchie et de l’expérience de son supérieur, n’en laisse rien paraître…

Il faut dire que la méthode d’investigation, ou plutôt l’absence de méthode du commissaire peut laisser perplexe. Restant en retrait, apparemment davantage préoccupé par des broutilles sans rapport avec le crime que par le crime lui-même, il laisse le monde s’agiter autour de lui sans s’embarrasser d’amabilités, s’irritant de l’impatience du maire qui attend des résultats, de l’effervescence des journalistes accourus sur les lieux, sympathise avec une jeune serveuse quasi transparente qu’il trouve d’emblée attachante malgré son manque de charme… son humeur semble à l’avenant de la grisaille humide qui plombe l’air ambiant.

L’auteur lui-même en dit très peu sur Jules Maigret, se posant en spectateur de cette apparente inertie, comme s’il avait lui aussi du mal à l’interpréter. Ceci dit, il est à peine plus prolixe sur les autres personnages de l’intrigue, se contentant, tout en économie et loin de toute analyse psychologique, de donner quelques repères, énonçant des faits, des comportements, laissant le lecteur appréhender l’ensemble pour se faire sa propre idée. C’est, ce faisant, l’occasion d’un "plongeon dans la vie provinciale" d’une petite ville attachée aux convenances, un microcosme dont on découvre l’hypocrise en même temps que les dessous peu reluisants -notables débauchant de jeunes ouvrières désargentées, trafics et pots-de-vin…

Il ne faut évidemment pas se fier aux apparences. Après s’être imprégné des atmosphères et s’être attaché mine de rien à décrypter les physionomies, ayant subitement décidé qu’il en avait marre de Concarneau, Maigret résout l’énigme en deux coups de cuiller à pot, dévoilant le rôle de ce chien d’aspect miteux, haut sur pattes et pourvu d’une grosse tête, qui traîne depuis le début de l’enquête dans les rues pavées de la cité bretonne…


D'autres titres pour découvrir Georges Simenon :

Une lecture commune autour de Georges Simenon initiée par Anne, dans le cadre du Mois Belge.
Maryline a lu Le fils Cardinaud


Petit Bac 2023, catégorie COULEUR

Commentaires

  1. Lu il y a longtemps et en partie oublié. Des Maigret, je me souviens plus d'une atmosphère que des détails de l'enquête.

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    1. Il faut dire qu'il y en a beaucoup, difficile de retenir toutes les intrigues ! Et puis les enquêtes semblent être secondaires.. ce qui compte, c'est en effet ce qui orbite autour, et la surprenante personnalité du commissaire...

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  2. J'aime bien Simenon mais pas Maigret et je ne suis pas sure que ce titre-là me plaise car les enquête qui se règlent au final en deux deux, je ne suis pas fan...

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    1. J'ai lu peu de titres de Simenon, et surtout des romans "durs" (les "sans Maigret"), que j'ai appréciés pour la précision avec laquelle il décortique la psychologie des personnages.

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  3. Concarneau, pourquoi pas? Un Maigret, c'est bien, j'ai tenté un Simenon sans Maigret, et lâché...

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    1. Ah mince, c'était lequel ? J'ai aussi lu un sans Maigret (La neige était sale), je rédigerai mon billet pour la fin du mois..

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  4. Ah ! Maigret ! On ne s'en lasse jamais... mais qui peut en douter ?

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    1. Je débute, de mon côté... mais j'en ai encore plein de côté !

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  5. J'ai finalement lu peu de livres de Simenon... pourtant, il a l'art de créer les ambiances. Et puis, j'ai gardé un bon souvenir de Concarneau.

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    1. J'aime bien Concarneau moi aussi (même si la cité pâtit, comme tant d'autres du même genre, de son succès touristique, qui fait se succéder dans ses rues les mêmes commerces que l'on voit maintenant partout, mais bon, on y trouve aussi la maison du kouign aman, ça compense !) quoique là, la ville ne soit pas spécialement mise en valeur, on en garde à la lecture une image de grisaille et de mesquinerie...

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  6. En train de lire un Simenon sans Maigret, Le voyageur de la Toussaint, qui se déroule à La Rochelle, une atmosphère pesante, il est question d’héritage, de collusion des notables car l’héritier est un jeune homme que ces messieurs comptent bien flouer… On reconnaît les rues de la ville, je verrais bien une adaptation de ce roman tellement le lecteur peut imaginer le film. J’ai très peu lu Simenon en réalité mais la découverte fonctionne avec moi.

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    1. Je l'ai très peu lu aussi, et pour l'instant j'ai apprécié.. La Rochelle, Concarneau, les Etats-Unis chez Kathel.. ce commissaire semble en tous cas être un grand voyageur !

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  7. Je l'ai certainement lu il y a longtemps, mais tu me donnes envie de le relire. j'adore Maigret et son absence de méthode que tu soulignes !

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    1. Oui, j'ai trouvé ça très drôle... tout ce monde qui s'agite autour de lui, qui reste imperturbable..

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  8. L'ai-je lu? j'ai un gros doute. Si oui, ça doit être le seul de l'auteur et je n'en garde aucun souvenir à part les clichés qu'on a tous en tête... Mais pourquoi pas, oui !

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    1. Le mois belge donne une bonne occasion de lire ou relire cet auteur, j'ai personnellement pris l'habitude de le retrouver chaque année en avril.

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  9. Je l'ai lu aussi mais j'ai tout oublié. Je le relirai ;-)

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    1. Comme tous les Simenon, il est court et se lit vite... cela compense le fait qu'il ait écrit des centaines de titres :) !

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  10. Je ne me rappelle plus trop de ce roman mais je sais que j'aime bien l'ambiance des romans de Simenon....

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    1. Je ne suis pas très étonnée que l'on oublie ses intrigues au profit de ses ambiances, en effet bine plus importantes..

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  11. Je crois bien que je confonds ce titre avec Les fantômes du Chapelier .... Pourtant, je sais que je l'ai lu parce que je me souviens de la scène d'ouverture dans l'obscurité du port, un must du genre "meurtre mystérieux dans la nuit"

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    1. Oui !, c'est une scène très cinématographique, on s'y croirait... et que tu confondes avec un autre titre ne me surprend pas vraiment, il en a écrit tellement !

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  12. J'ai lu quelques Simenon mais il y a tellement longtemps que c'est un peu comme si je n'en avais lu aucun. Je me souviens d'une enquête de maigre avec des tueurs américains en plein Paris, j'avais bien aimé. Faudrait que je m'y remette...
    nathalie

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    1. Le mois belge est une bonne occasion de s'y (re)mettre, justement, j'ai pris l'habitude de ce rendez-vous annuel avec Simenon, que je n'avais jamais lu auparavant, ayant été comme tant d'autres de ma génération rebutée l'aspect gris et vieillot des adaptations TV... à tort..

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  13. Lire un bon Simenon de temps en temps, ça fait du bien.

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    1. Tout à fait ! je ne suis que néophyte, avec mes 6 titres lus (et seulement deux Maigret), mais j'éprouve déjà beaucoup de plaisir à le retrouver chaque année, à l'occasion du mois belge.

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  14. Je me souviens l'avoir lu il ya quelques années et j'avais été séduit par l'ambiance du livre. Un vrai classique !

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    1. C'est vrai que l'atmosphère est bien rendue, avec cette grisaille humide qui pénètre les os, et certaines scènes, qui sont très "cinématographiques", et que l'on imagine sans peine...

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