LE RECAPITULATIF DE L'ACTIVITE

"Massacre des innocents" - Marc Biancarelli

"Mourez Innocents, mourez puisqu'il n'est nulle frontière entre ce que vous êtes et ce que vous fûtes, entre les états de l'être et de la conscience, mourez puisqu'il n'est de souffrance qui ne se perçoive et se réalise sans jouissance à l'équilibre. Mourez puisque vous n'existez que dans l'accomplissement de ce martyre."

Le 4 juin 1629, un navire de la Compagnie Hollandaise des Indes Orientales chargé de trésors, faisant route vers Batavia, s’égare loin du reste de sa flotte. Il s’échoue sur un récif au large de l’ouest australien, où les survivants du naufrage organisent leur survie, pendant qu’un groupe mené par les principaux officiers navigateurs tente, dans une chaloupe, de relier la terre ferme.

Marc Biancarelli s’empare de cet épisode historique pour le faire revivre à travers un récit aussi âpre qu’intense.

Aux conditions matérielles difficiles que doivent affronter les rescapés -notamment le manque d’eau et de nourriture- s’ajoute bientôt une menace née de l’association entre les obscures alliances nouées au cours d’une traversée plombée d’une ambiance de sédition et un isolement pourvoyeur d’impunité. Jeronymus Cornelisz, un apothicaire ayant fait faillite dans d’honteuses circonstances, va saisir cette opportunité.

Cet homme abject et torturé étend bientôt son autorité sur la petite communauté de survivants. A la tête de "la pire armée de scélérats dont on puisse rêver", il se dispense rapidement de tout prétexte légitime pour exercer son pouvoir, exilant sur un autre ilot ceux qui risqueraient de la remettre en cause. Ses sbires s’adonnent alors à une débauche effrénée de violence. Jeronymus, qu’un peintre dépravé a autrefois ouvert à la paresse morale, voit là l’accomplissement de l’œuvre de sa vie : ouvrir le sombre champ de la barbarie inhérente à l'homme, détachée de toute notion de bien ou de mal. Sans doute les temps se prêtent-ils à ces excès que l'on perpètre à coups de fumeuses justifications morales ou politiques. L’époque est à la torture et aux guerres -religieuses et territoriales-, et le peuple, broyé par la misère, trouve parfois sa survie dans d'infâmes expédients.

L’apothicaire trouvera pourtant quelqu’un pour le contrer. Depuis l’ilot où il a éloigné ses détracteurs, la résistance s’organise sous la houlette de Weybbe Hayes, un ancien soldat traumatisé par la guerre et ce qu’elle l’a amené à commettre. Marc Biancarelli en fait un héros complexe, dont le courage et la droiture se heurtent à sa mésestime de soi. Il peut compter sur l’infaillible soutien des hommes qui l’accompagnent, mais aussi sur celui de la noble Lucrecia qui, restée aux côtés de Jeronymus, révèle une force et une intelligence peu communes.

Interrogeant -sans réel espoir d’obtenir une réponse- sur les mécanismes qui font basculer les hommes dans la sauvagerie, "Massacre des innocents" est un récit halluciné et sanguinaire, porté par un sombre lyrisme se réclamant ouvertement, dans ses clairs obscurs et la dimension épique du chaos qu’il dépeint, de références picturales aux accents baroques et horrifiques.


D'autres titres pour découvrir Marc Biancarelli :

Une lecture commune avec Keisha, dont l'avis est ICI, et une participation au Book Trip EN MER, chez Fanja.

Commentaires

  1. Ah ça, je m'en doutais après avoir lu deux de ses romans, mais cela bouscule pas mal!!! Une chouette LC bien sûr. Pas sûr qu'on attire beaucoup de gens vers cette lecture âpre, mais quel style!

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    1. Oui, on retrouve entre autres le souffle macabre qui traverse "Orphelins de Dieu", mais aussi quelques figures lumineuses qui viennent tout de même le compenser... comme toi, admirative de la plume, j'ai beaucoup aimé.

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  2. En lisant tous ces billets à l'occasion du Book Trip en mer, je me rends compte qu'il s'agit presque toujours de mutineries, de naufrages et d'îles désertes. Le vrai défi va être de trouver un récit apaisé sur l'amour de la mer !

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    1. J'ai "L'île du Point Nemo" sur ma pile, mais il faut que je vérifie si : 1/Il rentre dans le cadre de l'activité et 2/ Le sujet en est plus joyeux que celui de ce titre et, c'est vrai, de la plupart de ceux qu'ont jusqu'à présent proposé les lectrices et lecteurs...

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    2. J'ai aussi L'île du Point Nemo dans ma PAL et ça fait un moment que j'essaie de le caser. Je ne sais pas non plus si la thématique maritime y est déterminante, mais si tu comptes le lire dans l'année, préviens-moi, je pourrai peut-être me joindre à toi.

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    3. Il y a visiblement des passages qui devraient le rendre éligible à l'activité, j'ai vu dans certains résumés qu'il y est question d'un sous-marin, et d'un ilot perdu du Pacifique... donc oui, je le lirai avant la fin du Book Trip en mer, et je verrai bien. Je te tiens au courant !

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  3. Ma réaction à la lecture de ton billet étant "mais quelle horreur" je ne lirai sans doute pas le livre. Ce qui m'interroge, car le livre que le blog chronique demain est également pas mal dans le genre horrifique et cauchemardesque, comme quoi, nos critères sont des crémaillères...

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    1. Tu me rends du coup bien curieuse de ce titre qui nous sera dévoilé demain...

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  4. Je pense qu'on peut trouver des récits de mer moins horrifiques que celui-ci... qui malheureusement s'inspire (comme souvent quand l'horreur domine) de faits réels. Je ne vous y suivrai pas.

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    1. J'aime beaucoup l'écriture de Marc Biancarelli, très éloquente. Il sait insuffler du souffle à ses intrigues, malgré leur noirceur.. Mais je comprends ta réticence..

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  5. Vous ne me tentez pas beaucoup en ce moment les filles ; je vais finir par m'en plaindre ;-)

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  6. "Un récit hallucinant et sanguinaire", tu as l'art de la formule :-) Comme les autres, je préfère fuir...

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    1. Tout le talent de l'auteur consiste à nous happer, malgré son propos ténébreux, dans cette histoire au service de laquelle il met une éloquence hypnotique...

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  7. Je viens de lire la chronique de Keisha alors forcément je viens lire tout de suite la tienne. Pourquoi ne suis-je pas étonnée que ce soit un livre dur, vu l'époque et le sujet !! Ce sont souvent des récits inspirés de faits réels et ma foi les marins ne se faisaient pas de cadeaux quand en plus, il s'agit de vie ou de mort...ça me tente tout de même mais ce ne sera pas pour tout de suite...

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    1. C'est dur car les faits le sont, c'est vrai, mais aussi parce que l'auteur sait donner une couleur particulière à son récit, entre lyrisme et âpreté.. et c'est très réussi !

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  8. et deux personnes le même jour donnant un avis positif sur ce roman ; il n'y a plus qu'à !

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  9. Ça fait aussi penser au Radeau de la méduse... Trop d'horreurs pour moi sans doute mais les traversées calmes font plus difficilement de bons livres.

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    1. C'est sûr que le contexte est ici pourvoyeur d'une tension qui rend le récit très prenant !

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  10. Je pourrais écrire la même chose qu'Aifelle ;-)

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  11. Après le naufrage vient le carnage. Ca se déroule il y a quelques siècles et ça pourrait tout aussi bien être une dystopie. Merci pour ton article magistral.

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    1. La réalité dépasse bien souvent la fiction, notamment lorsque c'est la barbarie qui s'exprime..

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  12. Ouah vous êtes bien courageuses avec Keisha pour avoir entamé ce périple qui semble loin d'être de tout repos. Le côté historique m'aurait bien intéressée, mais les mots barbarie, torture, sanguinaire me freinent. C'est un auteur que j'aimerais bien découvrir pour son écriture qui, visiblement, vaut le détour, mais il a l'air quand même bien versé dans le macabre. Merci en tout cas pour cette contribution au book trip en mer.

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    1. Je ne sais pas si on peut appeler ça du courage, puisque nous y allons volontiers, et qu'on en redemanderait presque (du masochisme, peut-être ?!)... je n'ai lu que trois titres de cet auteur (en même temps, je ne suis pas sûre qu'il en ait écrit beaucoup d'autres) et parmi eux, Murtoriu est différent, l'intrigue est contemporaine et bien moins macabre... par contre, le héros est très aigri et n'inspire guère la sympathie !

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  13. Je crois que mon commentaire d'hier n'est pas passé. L'intrigue est plutôt tumultueuse, si j'ai bien compris.

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    1. Il s'était mis dans les spams, que j'avais oublié de vérifier... c'est tumultueux, oui, mais surtout très violent...

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