"Ciel cruel" - Herbjørg Wassmo
"La vie étai ainsi faite : le pire mal le qu’on puisse se faire les uns aux autres ne laisse jamais aucun gagnant."
Pour résumer l’opus précédent sans trop en dévoiler, Tora a quitté son île du nord de la Norvège pour aller étudier sur le continent. Elle a ainsi laissé derrière elle un beau-père alcoolique et maltraitant, et une mère trop épuisée, trop recroquevillée sur son sentiment d’infériorité pour s’apercevoir de quoi que ce soit. Traumatisée par ce qu’elle a subi, Tora dérive vers la folie, son mutisme et son apparente indifférence au monde dissimulant des angoisses obsessionnelles et un profond mal-être s’exprimant notamment à l’occasion de cauchemars aussi prégnants qu’effroyables.
C’est une fois de plus la tante Rakel qui prend les choses en main en lui rendant visite, inquiète du silence de sa nièce et de son refus de rentrer à Vaeret pour les vacances. Tora lui confie le secret qui la torture depuis si longtemps, et Rakel, avec sa force, son intelligence et son extrême empathie, sait trouver les mots pour que la jeune fille entame une possible reconstruction et se libère de tout sentiment de culpabilité.
Tora apprivoise certaines de ses peurs, trouve une nouvelle assurance et une sorte de maitrise dans ses relations avec autrui, mais son équilibre est fragile, car fondé sur un subterfuge qu’alimente le déni, non pas tant de ce qu’elle a vécu, que de qui elle est réellement. Son cheminement en quête de soi est bancal, contraint par son positionnement vis-à-vis de modèles féminins dont elle ne parvient pas à se détacher, qu’elle s’y identifie ou qu’elle les rejette.
Pendant ce temps, sur l’île pour laquelle la jeune fille éprouve un dégoût grandissant, Rakel lutte contre un mal devenu insupportable, dont elle tait la gravité et l’inéluctable issue à son entourage. Ingrid souffre de la distance que lui impose Tora, qui n’est pas que géographique, mais s’exprime par un détachement presque méprisant, qui révèle le gouffre installé entre sa fille et une mère étrangère au secret qui l’a détruite et qui, incapable de se sauver elle-même, n’a pas su la protéger. La femme d’Henrik est plus que jamais écrasée par la conviction de son insignifiance, s’enfermant elle-même dans le rôle de celle qui, fade et morose, est faite pour être négligée. Rakel, la solaire, qui a toujours été la préférée, a fini par la déposséder de sa fille… Quant à Henrik, il se révèle dans ce dernier opus à la fois repoussant et pitoyable, démuni car rattrapé par ses fautes et continuant pourtant à ne se considérer que comme une victime.
Je suis bien d'accord avec toi. C'est impressionnant cette capacité de l'autrice à créer des personnages complexes et ambivalents sans pour autant assommer son lecteur avec de longues analyses psychologiques. Herbjørg Wassmo est aussi très forte pour créer des ambiances (souvent pesantes). J'ai été bluffée par la singularité et la puissance de son écriture.
RépondreSupprimerMoi aussi, même si j'ai lu plusieurs autres titres d'elle avant cette trilogie. J'ai trouvé le style, ici, vraiment très singulier, d'un abord certes abrupt, comme tu l'évoques dans ton billet, mais finalement très efficace, car à la fois percutant et marquant.
SupprimerJe me souviens peu de ce dernier tome ... Sans doute parce que j'avais lu les trois tomes à suivre. A te lire, je retrouve quand même ce sentiment poignant qui m'avait profondément touchée, celui d'une impossible fuite ...
RépondreSupprimerOui, Tora donne l'impression de passer d'une emprise à l'autre, sans parvenir à trouver sa propre voie et l'acceptation de ce qu'elle est. Cette trilogie est apparemment inspirée de la propre vie de l'auteure, je me demande dans quelle mesure elle colle à sa propre perception des événements terribles qu'elle a subis. C'est très fort en tous cas, et merci du conseil, car c'est toi qui m'a orientée vers ces romans..
Supprimerune trilogie que je lirai peut être un jour mais je sais que ça se termine mal, alors il me faut un peu d ecourage
RépondreSupprimerC'est en effet une lecture souvent difficile, et s'il y a quelques points de lumière, notamment grâce au personnage de Rakel ou de la jeune Soleil (que l'on revoit brièvement dans ce 3e opus mais qui est surtout présente dans les précédents), c'est vrai qu'ils ne suffisent pas à compenser la noirceur de l'ensemble...
SupprimerUne excellente série, une fin poignante.
RépondreSupprimerNous sommes d'accord...
Supprimertristounet la fin ? si tu as déjà lu l'autrice, tu as un livre en tête ? car là ça fait un peu long et un peu trop sombre
RépondreSupprimerOuii, la trilogie de Dina (chaque volume est mince et ça se lit à toute vitesse...), qui met en scène une héroïne atypique et inoubliable !
SupprimerJ'ai plutôt aimé ce que j'ai lu d'elle, je la découvrirais bien, cette trilogie...
RépondreSupprimerN'hésite pas, elle est excellente...
SupprimerJe note ta réponse à Electra, ça me semble être un choix plus raisonnable pour enfin découvrir cette auteure.^^
RépondreSupprimerBonne idée !
Supprimer